C’est le jeu à chaque remaniement : qui, en région, pourrait aller s’asseoir à la table des ministres. L’exercice permet de constater que le nombre de postulants reste très réduit en Occitanie. Analyse.
“La semaine prochaine, on aura un gouvernement”. Michel Barnier l’a promis mercredi dernier, la fumée blanche devrait (enfin) sortir de Matignon dans les prochains jours. Le Premier ministre doit présenter une équipe “la plus large possible”, sous-entendu de la droite, sa famille politique, à la gauche sociale-démocrate.
Alors qui pour intégrer le nouvel exécutif ? Le chaos politique engendré par la dissolution rend encore plus complexe que d’habitude le petit jeu des pronostics. Quoi que, en Occitanie, cela semble finalement assez limpide, le nombre de ministres putatifs étant très réduit.
“Je ne vois aucun traître à gauche dans la région”
Les dernières élections ont effet réduit le spectre politique régional. Les grands élus se trouvent désormais essentiellement, soit au Rassemblement national, soit à gauche. Or, des ministres RN, c’est exclu. Et au PS, “je ne vois aucun traître à gauche dans la région”, pose le sénateur Hussein Bourgi, qui rappelle que Michel Barnier a déjà esquissé une politique “à droite toute”. “Se rallier à lui, ce serait donc trahir ses idées et sa famille politique”, dit-il. La présidente de Région Carole Delga, interrogée sur France 2 cette semaine, a confirmé qu’elle ne participerait pas à un gouvernement “qui ne respecte pas le vote des Français”, plaidant même pour sa censure. Le maire de Montpellier Michaël Delafosse dit peu ou prou la même chose.
“Savoir gérer un budget et parler à l’opposition”
“C’est dommage”, regrette l’ex-député macroniste héraultais Patrick Vignal, qui aurait aimé que ces élus de poids changent de logiciel. “Arriver à la table de Michel Barnier avec une feuille de route pour un an sur des sujets majeurs, ça serait courageux et les électeurs en tiendraient compte”, estime-t-il. Mais alors qui, pour donner cette coloration rosée à ce gouvernement que souhaite aussi le Président ? “Des élus qui ont l’expérience du terrain, qui savent gérer un budget, qui savent parler à l’opposition”, dit-il, soufflant le nom de personnalités issues du PS, comme le maire de Rodez Christian Teissedre ou le désormais président du Département de Lozère Laurent Suau, semblant oublier que ceux-ci ont depuis frayé avec le macronisme. Le premier, en tout cas, nous assure qu’il n’a eu “aucun contact”.
“Il faudra donner le sentiment de mâtiner cet exécutif d’une droite plus modérée”
Si la sphère macroniste aura sa place au gouvernement, le nombre de candidats de l’Occitanie sera pourtant réduit, tant les dernières législatives ont réduit à peau de chagrin, ici, le contingent de cadres. La secrétaire d’État aux Anciens combattants Patricia Mirallès pourrait faire partie des sortants renouvelés au regard de son bilan satisfaisant sur l’année de commémorations, “mais elle aussi a perdu et la règle qu’un ministre battu ne peut être reconduit est immuable”, rappelle implacable Hussein Bourgi.
Lui, voit donc plutôt, pour représenter la région dans cet exécutif, des élus Les Républicains. “Si la droite dure de Wauquiez et Retailleau rentre en force, il faudra donner le sentiment de mâtiner cela d’une forme de droite plus modérée, plus rurale et un peu plus jeune, et le député du Lot Aurélien Pradié pourrait être le ministre idoine”, observe-t-il, ajoutant, grinçant : “Il en rêve”. Ce peut aussi être le moins médiatique député du Tarn Philippe Bonnecarrière, qui affiche un CV d’élu local complet, avec le bonus d’avoir battu le RN en juin.
Laisser son mandat pour un ministère à durée de vie limitée ?
Côté Languedoc-Roussillon, on cite aussi souvent les maires ou président d’Agglomération Stéphan Rossignol, Franck Proust – maintenant qu’il est libéré de tout risque judiciaire – ou Christophe Rivenq. “Je n’ai pas manifesté d’intérêt même si j’apporte mon total soutien à Michel Barnier”, nous assure le maire de La Grande-Motte, ajoutant : “ma priorité reste ma ville et mon territoire du Pays de l’Or. Mais je reste disposé à apporter ma contribution au redressement du pays”.
Cela illustre un casse-tête pour nombre d’élus locaux : est-il prudent de laisser son mandat pour un gouvernement dont la durée de vie pourrait être très limitée, ce qui s’apparente à s’asseoir sur un siège éjectable ? “On peut être légalement maire et ministre. Ce non-cumul, c’est une règle tacite sur lequel il serait temps de revenir dans l’intérêt du pays”, observe le secrétaire départemental des LR de l’Hérault Arnaud Julien, qui estime “nécessaire” que la région soit représentée “pour peser sur des dossiers majeurs”.
Et Robert Ménard ?
À Béziers, le non-encarté Robert Ménard aurait la possibilité de passer le relais, au moins un temps, à son épouse Emmanuelle maintenant qu’elle n’est plus députée. Lui qui avait soufflé en juin qu’il ne serait pas opposé à un ministère même si cela dépendrait d’”avec qui et pour quoi faire”, a dit cette semaine tout le bien qu’il pensait de Michel Barnier. “Mais il reste marqué par son compagnonnage, jadis, avec le RN”, balaye un élu régional. L’hypothèse d’un gouvernement à l’accent occitan est décidément réduite.