Les lois restrictives sur l’avortement en Pologne violent les droits des femmes, a estimé ce lundi 26 août un comité des Nations unies.
Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (Cedaw), composé de 23 experts, a lancé en 2021 une enquête sur le droit à l’avortement en Pologne. Il n’est autorisé que si la grossesse résulte d’une agression sexuelle ou d’un inceste, ou si elle constitue une menace directe pour la vie ou la santé de la mère.
“Une violence fondée sur le genre”
L’enquête a montré que les femmes sont confrontées à “de graves violations des droits humains en raison de lois restrictives sur l’avortement, beaucoup d’entre elles étant obligées de mener à terme des grossesses non désirées, de recourir à des procédures clandestines dangereuses ou de se rendre à l’étranger”, a indiqué le comité dans un communiqué.
Cette situation “constitue une violence fondée sur le genre allant à l’encontre des femmes et peut être assimilée à de la torture ou à un traitement cruel, inhumain ou dégradant”, a déclaré la vice-présidente du comité, la Bulgare Genoveva Tisheva, dans le communiqué.
Une enquête en coopération avec le gouvernement
Elle s’est rendue en Pologne en 2022, avec une ancienne membre du comité, Lia Nadaria, pour l’enquête, à laquelle le gouvernement a coopéré tout au long de la procédure, selon le communiqué.
Le comité dénonce la criminalisation de l’aide apportée aux femmes souhaitant avorter. Il a également constaté que “le cadre juridique déjà restrictif est affaibli par de graves défauts dans sa mise en œuvre”, de sorte que “les médecins hésitent souvent à pratiquer des avortements, même légaux, par crainte de voir leur responsabilité pénale engagée, et retardent souvent la procédure jusqu’à ce que la vie de la femme soit en danger immédiat”.
“Un environnement hostile”
Le Cedaw souligne que de nombreux médecins refusent de pratiquer des avortements pour des raisons morales ou religieuses. Il affirme que l’accès à l’avortement en cas de grossesse résultant d’un crime est fortement entravé par le système bureaucratique, sur fonds de “puissants groupes de pression anti-avortement, de menaces et de dénonciations à l’encontre de ceux qui aident les femmes à se faire avorter”.
“Ensemble, ces facteurs créent un environnement complexe, hostile et effrayant dans lequel l’accès à un avortement sûr est stigmatisé et pratiquement impossible”, a conclu Mme Tisheva.
La Pologne, pays le plus strict en Europe
La coalition au pouvoir en Pologne s’est engagée à libéraliser les lois sur l’avortement, qui comptent parmi les plus strictes d’Europe. Elles punissent notamment l’aide à l’avortement d’une peine pouvant aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement.
La dernière tentative d’assouplissement de ces règles a échoué en juillet, lorsque les législateurs ont rejeté, par 218 voix contre 215, un projet de loi visant à supprimer la disposition interdisant l’aide à l’avortement.