Deux agressions très médiatisées contre des Australiens à Paris ont suscité des inquiétudes quant à la sécurité à l’approche des Jeux olympiques.
Samedi soir, une jeune femme aurait été agressée sexuellement par un groupe d’hommes.
Lundi, deux employés de Channel 9 ont été agressés lors d’une tentative de vol.
En réponse, le Comité olympique australien a conseillé aux athlètes de ne pas voyager seuls ou de porter l’uniforme de leur équipe en dehors du village olympique.
Le gouvernement français s’est préparé à une hausse de la criminalité pendant les Jeux, mais les services de sécurité ont concentré leurs énergies sur la protection des événements contre d’éventuelles attaques terroristes.
Parallèlement, si le Comité international olympique (CIO) est particulièrement attentif à la manière dont les événements sportifs soulèvent le risque de terrorisme, il se méfie également de la manière dont le sport peut ouvrir la voie à des rivalités internationales et à des protestations politiques individuelles.
Alors que les jeux se préparent à être officiellement lancés, que se passe-t-il à Paris ?
Sécurité
Les Jeux olympiques de Paris ont déjà débuté avec le rugby à sept et le football, mais même cela ne s’est pas déroulé sans heurts, avec une invasion de supporters venant gâcher le choc de football entre l’Argentine et le Maroc.
À moins de 24 heures de la cérémonie d’ouverture, la capitale française est soumise au régime de sécurité le plus strict de son histoire.
Le gouvernement français, inquiet d’une nouvelle attaque contre un événement sportif comme l’attentat à la bombe devant le Stade de France en 2015, a restreint l’accès autour de la Seine.
Les habitants et les travailleurs doivent obtenir un code QR Games Pass ou une accréditation olympique pour pouvoir accéder au quartier. De nombreux habitants et touristes ont été exclus des quartiers les plus aisés de la capitale.
La prudence des organisateurs pourrait être justifiée. Des athlètes israéliens ont déjà reçu des menaces de mort sur les réseaux sociaux : « arrive en France, on te tue ».
Ils ont également été menacés d’une reconstitution des Jeux de Munich 1972, lorsque les terroristes de Septembre Noir ont tué 11 sportifs israéliens.
En conséquence, les athlètes israéliens à Paris bénéficieront d’une sécurité 24 heures sur 24 de la part des autorités françaises et israéliennes.
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Géopolitique
Malgré tous les efforts du CIO, les conflits internationaux déterminent qui peut participer aux Jeux et qui ne le peut pas.
Les athlètes biélorusses et russes seront les plus absents, car ils ne pourront concourir qu’en tant qu’athlètes individuels et indépendants sous un drapeau neutre. Pas moins de 36 athlètes russes et 28 athlètes biélorusses se sont qualifiés selon ces règles.
Malgré tout, de nombreux critiques soulignent que ces athlètes pourraient être utilisés comme agents de l’État.
Les responsables du gouvernement ukrainien estiment depuis longtemps que la réponse du CIO à l’invasion russe a encouragé la guerre et ils ont rejeté la position actuelle du CIO qui autorise une participation russe limitée aux Jeux comme étant insuffisante.
Les hommes politiques russes et le comité olympique de ce pays ont rejeté la décision du CIO comme étant « inacceptable » et se sont demandés ouvertement pourquoi ils étaient eux-mêmes ciblés et pas Israël.
Pendant ce temps, le Comité olympique palestinien a appelé à une interdiction des athlètes israéliens.
Alors que 88 athlètes israéliens se rendront à Paris, seuls huit athlètes palestiniens feront le même déplacement.
Pour les athlètes olympiques palestiniens présents à Paris, les médailles d’or ne sont pas l’objectif principal – le directeur du Comité olympique palestinien, Nader Jayousi, souhaite revendiquer l’indépendance nationale et « montrer notre palestinisme ».
Le sport offre souvent aux pays un espace où ils peuvent exprimer leurs rivalités internationales, et les Jeux olympiques sont souvent impliqués dans ces conflits.
Les relations entre l’Australie et la Chine sont tendues depuis la pandémie de COVID-19. Même si les relations entre les deux pays se sont améliorées, les responsables sportifs australiens, dont le directeur général de Sports Integrity Australia, David Sharpe, ont presque tous accusé la Chine de mettre en place un programme de dopage sponsorisé par l’État.
La controverse a atteint son paroxysme récemment lorsqu’il a été révélé que 23 nageurs chinois avaient été testés positifs à un médicament interdit début 2021 et avaient été autorisés à concourir aux Jeux de Tokyo six mois plus tard sans sanction. Onze d’entre eux concourront à Paris.
L’ancien athlète olympique australien Grant Hackett a suggéré que les athlètes australiens pourraient organiser une manifestation visible en réponse.
La politique des athlètes
Les athlètes protestent rarement pendant les Jeux, car les règles des Jeux olympiques interdisent aux concurrents de faire des déclarations qui pourraient être de nature « politique, religieuse ou raciale ».
Il existe cependant quelques exemples célèbres d’athlètes qui ont ignoré ce mandat, notamment l’Australien Peter Norman, qui a soutenu la manifestation « Black Power » de John Carlos et Tommie Smith en 1968.
Les efforts du CIO pour contrôler la liberté d’expression des athlètes semblent parfois extrêmes : par exemple, les responsables du CIO ont demandé au surfeur brésilien Joao Chianca de retirer un motif du Christ Rédempteur du dessous de sa planche de surf.
Les gestes et symboles religieux sont cependant courants lors des Jeux – pensez aux athlètes pointant vers le ciel en réponse à une victoire – et les règles des différentes organisations sportives semblent arbitraires.
Des groupes de défense des droits de l’homme ont appelé le CIO à lutter plus vigoureusement contre l’interdiction faite aux athlètes féminines de porter le hijab par le Comité olympique français.
En réalité, le caractère imprévisible des manifestations sportives rend impossible toute intervention du CIO. Les joueurs américains de la NBA exprimeront-ils leur opinion sur les élections américaines ? Les athlètes palestiniens refuseront-ils de concourir contre les Israéliens ? L’extrême droite française utilisera-t-elle les Jeux comme une occasion de s’opposer à la formation d’un gouvernement de gauche ?
À bien des égards, les efforts du CIO sont vains, car les discours des athlètes peuvent se dérouler dans de nombreux endroits, au-delà du podium. Les athlètes équipés de smartphones feront des déclarations qui seront visibles en temps réel par les spectateurs du monde entier.
Quelles que soient les décisions prises par le CIO à Paris et à l’avenir, les efforts du CIO pour rendre le sport apolitique représentent un objectif impossible.
Le CIO est peut-être contre la politisation du sport, mais le sport sera toujours politique.