Dans le hall d’entrée de l’hôpital européen Georges Pompidou, entre trente et quarante blouses blanches et bleues entourent Christophe Prudhomme, médecin urgentiste, porte-parole de l’association des médecins urgentistes de France (AMUF) et chroniqueur dans l’Humanité.
Sous la large verrière, il met en garde : « Pour l’instant, on assure la continuité du service public, mais si la direction de l’hôpital ne tient pas compte du mouvement de grève, personne ne va venir travailler le 26 juillet, c’est-à-dire le jour de l’ouverture des Jeux Olympiques. Je pense que ça aura un retentissement bien au-delà de la France ! ».
Après un discours applaudi par son auditoire, le bruyant cortège se met en route, aux cris d’« hôpital, en colère ! ». Un aller-retour dans le hall, un tour à l’extérieur devant l’enceinte de l’hôpital, puis tous s’évanouissent et retournent à leur service.
Les soignants au bord de la rupture
Dans un système hospitalier soumis aux réquisitions de personnel, la grève aux urgences n’est pas de mise malgré des conditions d’accueil des patients de plus en plus compliquées. Joran Jamelot, délégué CGT de l’hôpital, explique que cela fait des mois qu’ils alertent, des années que les problèmes sont les mêmes.
« On fait face à un manque de personnel et à une dégradation des conditions d’accueil. Aux urgences, on retrouve des personnes précaires sans médecins traitants, des personnes sans domicile fixes, des personnes âgées qui ne disposent pas de structures gériatriques, des personnes relevant de problèmes psychiatriques… Ce qu’on demande, ce sont des bras, des lits, du matériel ».
Face à une situation déjà difficile au quotidien, l’approche des Jeux Olympiques ne réjouit personne, avec son flot possible de patients supplémentaires, sans forcément plus de personnel en capacité de les accueillir, sans soutien complémentaire de la part de l’État.
Une infirmière de nuit désirant rester anonyme semble très touchée par la situation : « On ne touchera sans doute pas la prime JO, on ne sait même pas qui la recevra. J’aimerais que le gouvernement revoie le salaire des infirmiers et des infirmières, car les gens ne veulent plus venir dans l’hôpital public. Tout le monde se dirige vers le privé car les salaires du public ne sont pas assez élevés ». Elle se plaint également des recrutements de plus en plus nombreux d’aides-soignants en CDD, pour éviter de payer la prime d’installation « par souci d’économies ».
Les économies, cela semble être une obsession au sein de l’hôpital public. « Ils ont supprimé les postes de psychiatres et d’infirmières psychiatres la nuit », poursuit-elle. Conséquence : les patients victimes de troubles psychiatriques sont très mal accueillis. Faute de lits disponibles, ils restent « sur les brancards toute la nuit avant l’arrivée du psychiatre à neuf heures. S’ils s’excitent, on leur donne un calmant ou on les attache ».
Plusieurs soignants confirment le manque de places, les urgences qui débordent, les patients se retrouvant sur des brancards « pendant des heures, voire des journées entières, dans les couloirs… là où on peut » soupire Joran Jamelot.
À l’accueil et dans la salle d’attente, on souligne un autre problème : la cohabitation entre les patients et leurs accompagnants, et certaines personnes sans domicile fixe. « Il y a des agressions, parfois des couteaux qui entrent dans l’enceinte de l’hôpital, des personnes en état d’ébriété, surtout la nuit… c’est ingérable avec le manque de personnel. Je me retrouve à devoir rester à l’accueil pendant plus de dix heures, seul et sans pause, car il n’y a personne pour me remplacer ». Face à l’absence de réponse de la direction de l’hôpital, la CGT appelle à un autre rassemblement ce jeudi 11 juillet à 13 h 30.
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