Ne jamais rien céder à l’adversité, pourrait être la devise de Wilma Rudolph. « ”Je ne peux pas”, sont des mots qui n’ont jamais fait partie de mon vocabulaire. Je crois en moi plus que tout au monde », résumait celle qui fut considérée comme la femme la plus rapide au monde. En 1960, aux Jeux olympiques de Rome, les premiers à être diffusés à la télévision, la Gazelle noire, comme on va bientôt l’appeler, remporte tout. Trois médailles d’or dans les courses reines, 100 mètres, 200 mètres et le relais quatre fois 100 mètres, dans lequel sa détermination permet aux Américaines, pourtant mal parties, d’emporter la première place face à l’équipe allemande. Devant un stade qui l’acclame, Wilma devient une star mondiale.
Quel chemin parcouru pour la petite fille d’une famille pauvre et noire, née en 1940 à Clarksville dans le Tennessee, au cœur du Sud ségrégationniste. Née prématurée, 20e des 22 enfants de son père, elle contracte de nombreuses maladies infantiles (pneumonie, scarlatine, rougeole). À l’âge de 5 ans, une attaque de poliomyélite la laisse paralysée et la contraint à porter une attelle à la jambe gauche. Dans cet État qui a vu naître le Ku Klux Klan, les structures de santé de la ville sont réservées aux Blancs. Mais sa mère refuse de baisser les bras. Deux fois par semaine, elle entreprend le trajet de plus de 50 kilomètres jusqu’à l’hôpital de Nashville pour que sa fille puisse bénéficier de soins. Elle y apprend aussi à lui prodiguer des massages et enrôle les frères et sœurs, qui se relaient quatre fois par jour pour masser la malade.
« Moustique », parce que petite et rapide
La petite Wilma s’accroche à cette volonté maternelle et s’appuie sur cette famille unie et aimante. « Mon docteur m’a dit que je ne pourrai plus jamais marcher. Ma mère m’a dit que je le pourrai. J’ai cru ma mère », résumera-t-elle dans son autobiographie. À 11 ans, déjouant tous les pronostics, elle marche à nouveau. Un an après, Wilma en est déjà à « défier tous les garçons du quartier à la course, au saut et à tout ». Mais cela ne lui suffit pas. Grâce à l’intervention de son père, qui réussit à vaincre l’hostilité des entraîneurs, elle rejoint sa sœur dans l’équipe de basket de leur école. Très vite, elle y excelle. Son entraîneur la surnomme « Moustique », en référence à sa vitesse et à sa petite taille.
Ce qui va faire basculer sa vie vers la course, c’est sa rencontre avec Ed Temple. Dans ces années 1950 où les femmes ne comptent pas pour grand-chose dans le monde du sport et les femmes noires encore moins, Ed a l’idée de créer une équipe de course à pied féminine au sein de l’université d’État du Tennessee (TSU). Il pioche des recrues parmi les basketteuses, et Wilma l’impressionne tellement qu’il l’invite à se joindre au programme d’entraînement estival qu’il organise. Pendant deux ans, elle va continuer, parallèlement au lycée, à s’entraîner sous sa supervision avec les Tigerbelles, un groupe d’athlètes féminines légèrement plus âgées et expérimentées qu’elle. En 1956, elle n’a que 16 ans lorsqu’elle participe, avec elles, au quatre fois 100 mètres des Jeux olympiques de Melbourne. L’équipe remporte le bonze. De quoi donner à Wilma l’envie de conquérir l’or et de lui permettre, en 1958, de devenir une Tigerbelles à part entière, Ed ayant choisi de la garder dans l’équipe malgré une première grossesse. L’équipe va marquer le sport féminin. Aux Jeux de Rome, elles remportent 23 médailles, dont les trois plus prestigieuses par Wilma.
Un symbole et un porte-voix
Mais pour la jeune athlète, le combat n’est pas que dans les stades. Quand elle rentre de Rome, le gouverneur Buford Ellington prévoit d’interdire aux Noirs les festivités organisées en son honneur. Wilma refuse d‘y participer et obtient que la fête et le banquet deviennent le premier événement inter-racial de Clarksville. Invitée dans les émissions de télévision les plus populaires, elle se sert de son prestige pour combattre le racisme et le sexisme prégnants dans l’Amérique des années 1960. En 1963, sa participation au mouvement contre un des restaurants de la ville qui continue à refuser de servir des Noirs – y compris la triple championne – va contribuer à attirer l’attention des médias nationaux sur l’ampleur de la ségrégation qui sévit dans le Sud.
Wilma Rudolph dédie surtout sa vie aux jeunes générations de femmes noires américaines. Elle pour qui étudier a toujours été une priorité devient enseignante. Elle reste en parallèle entraîneuse et s’engage dans de nombreuses fondations pour le développement du sport féminin. Décédée d’un cancer de la gorge en 1994, Wilma fut un modèle pour des générations de sportives noires, à qui elle a transmis son credo. « Ne sous-estimez jamais le pouvoir des rêves et la force de l’esprit humain. De ce point de vue, nous sommes tous les mêmes. En chacun de nous se trouve le potentiel pour l’excellence. »
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