C’est l’heure des comptes. Comme chaque année, à l’approche de l’été, l’agriculture biologique réalise son autodiagnostic. Après une année charnière pour le secteur, ponctuée par des mobilisations agricoles de janvier à mars pour dénoncer les difficultés éprouvées par les producteurs des filières, les chiffres de la production étaient ardemment attendus.
Et comme pressenti lors de la présentation du baromètre de la consommation de l’agriculture biologique au mois de février, la production de la filière se dirige vers une stabilisation de son marché, d’après les chiffres publiés par l’Agence Bio, ce jeudi 13 juin.
« La croissance 2023 est une sorte d’année blanche », introduit Jean Verdier, président de l’Agence Bio, lors de sa présentation au sein de la maison Lanson Champagne, à Reims. Dans un contexte, en 2023, marqué par des baisses des dépenses alimentaires des ménages français (hors inflation) de 4,7 % à 180 milliards d’euros, la part des dépenses allouées au bio est passée de 6 à 5,6 %.
La consommation à domicile reste très largement majoritaire
« La consommation du bio est plutôt atone cette année. Mais il subit moins l’inflation (7,7 %) cette année que l’alimentaire conventionnel (11,8 %). La vente directe constitue un maillage beaucoup plus dense que la grande distribution », explique Laure Verdier, directrice de l’Agence Bio.
Particularité des chiffres présentés pour 2023, la vente directe du bio est en croissance par rapport à la grande distribution avec un débouché de la vente directe à 14 % (via les 26 800 fermes qui la pratiquent). Mais, léger écueil, l’objectif fixé par la loi Égalim, le 1er janvier 2022, d’imposer un taux minimum de 20 % en valeur de produits issus de l’agriculture biologique dans la restauration collective publique n’est toujours pas respectée.
Dans les plateaux de cantines, la part de bio passe de 7 à 6 %. En France, la consommation à domicile reste très largement majoritaire : 91 % des agriculteurs bio y trouvent leurs débouchés contre 9 % pour le hors-domicile — cantine ou au restaurant — d’après les chiffres de l’Agence Bio.
Pour autant, le bio génère toujours de l’intérêt auprès des agriculteurs. La plateforme dénombre 4 126 nouveaux producteurs en bio même si ce chiffre représente une réduction de 14 % par rapport à 2022 (4 811 entrées en 2022).
La part de surface cultivée en bio baisse
Le nombre d’amoureux de ces pratiques vertueuses diminue également. La plateforme nationale d’information et d’actions du bio a enregistré 3 054 arrêts de certification biologique en 2023 (contre 2 947 en 2022). Elle explique cette chute par des changements dans le choix de conduite de la ferme, des départs en retraite et des liquidations ou changements administratifs de l’exploitation.
Mais pas de quoi s’alarmer. Avec la venue de nouveaux producteurs, l’Agence bio comptabilise toujours 61 000 fermes engagées, tout ou en partie en agriculture biologique, soit 14 % du nombre des fermes françaises. À titre d’exemple, en 2022 plus de 60 000 exploitations (soit 14 % du total) se sont investies dans l’agriculture biologique, 2,5 fois plus qu’il y a dix ans, rappelait en février une étude de l’INSEE. Un motif de satisfaction donc mais encore insuffisant au regard de l’amoindrissement de la part des surfaces agricoles bio sur le territoire.
« La France compte 2,8 millions d’hectares de surfaces en bio (soit 10,4 % de la surface agricole totale en France) Nous restons les champions en Europe mais nous avons perdu 54 000 hectares de terrain en 2023, regrette Laure Verdier. Rien de significatif mais cela est embêtant car on constate une augmentation de 7 % de nouveaux agriculteurs en bio d’un côté et des surfaces plus petites d’un autre ».
La marche est encore longue pour atteindre l’objectif de 18 % de surfaces agricoles en bio à atteindre d’ici 2027 défini par l’État.