Des silhouettes en carton noir pour ne pas oublier les morts au travail. Mardi 11 juin, plus d’une centaine de salariés de l’INRS (Institut national de recherche et de sécurité) ont manifesté à deux pas du ministère de la Santé à l’appel de la CFDT, de la CGT et de la CFE-CGC.
Tous dénoncent l’étranglement financier que fait subir le gouvernement au seul institut de recherche sur le travail et les risques professionnels. Pourtant, les mots du premier ministre Gabriel Attal évoquant, en mars, « une grande initiative » sur les accidents du travail, résonnent encore alors que la France est dans ce domaine au-dessus de la moyenne de l’Union européenne. Ce ne sont pas les 11 nouvelles mesures énoncées par la ministre du Travail, le 14 mai, qui changent la donne.
« Il nous faut au moins 91 millions pour mener à bien nos missions »
Si, en 2022, le conseil d’administration de l’INRS avait voté à l’unanimité une augmentation de sa subvention dans le cadre du budget de la branche accidents du travail-maladie professionnelle (AT-MP) de la Sécurité sociale, tout est gelé depuis. L’association-loi 1901 fonctionne avec un budget provisoire jusqu’à l’aboutissement de la prochaine négociation de la convention d’objectifs et de gestion (COG) qui vient de démarrer.
« L’enveloppe provisoire (63 millions en 2024) ne permet pas de couvrir les besoins, pointe Marc Benoît, représentant syndical CGT au CSE central. Il nous faut au moins 91 millions pour mener à bien nos missions et nos objectifs. Si les hausses budgétaires ne s’appliquent pas, nous allons perdre 100 postes d’ici à la fin 2027. En vingt ans, cela fera 200 postes disparus. »
L’Accord national interprofessionnel de 2023 relatif aux accidents du travail et maladies professionnelles avait également prévu d’affecter 100 millions d’euros en plus par an à la prévention, mais, là encore, l’association créée en 1947 sous l’égide de la Sécurité sociale n’a rien vu venir. Pour tous, cette décision d’assécher les caisses est d’autant plus incompréhensible que la branche AT-MP de l’assurance-maladie est excédentaire, autour de 2,2 milliards d’euros en 2023.
Les salaires payés jusqu’en septembre
Faute de moyens, de nombreuses missions et pistes de recherche stagnent ou sont à l’arrêt depuis des années. « Il n’y a, par exemple, plus de formation sur les risques du bâtiment, alerte Jérôme Grosjean, secrétaire CFDT du CSE sur le deuxième site de Vendœuvre-lès-Nancy (Meurthe-et-Moselle). C’est le problème de la production intellectuelle au long cours sur une filière professionnelle qui sert ensuite à faire de la prévention : on ne peut pas être dans une vision à court terme. Avec le dernier coup de rabot, on n’a pas pu embaucher les six postes fléchés sur l’étude des risques psycho-sociaux. Sans compter les potentiels dangers pour la santé qu’on n’arrivera pas à détecter. »
La survie même de l’INRS pourrait être en jeu. « Nous avons de quoi payer les salaires jusqu’en septembre et ensuite, ça va être compliqué », explique Sophie, une des employées. « Les experts sont moins nombreux pour répondre aux demandes, on a réduit la diffusion de notre mensuel aux entreprises… » égrène Alexandre Dubus, représentant de la CFE-CGC, pour illustrer le fonctionnement au ralenti.
La perspective d’une majorité Rassemblement national à l’Assemblée inquiète encore plus les grévistes. « Comme ils prônent une exonération des cotisations patronales alors que c’est ce qui nous finance, ça serait le dernier clou dans notre cercueil », souffle Jérôme Grosjean.
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