Un an et demi après un appel à manifester des syndicats de pharmaciens et d’étudiants, la première grande grève des pharmaciens depuis ces dix dernières années a eu lieu ce jeudi 30 mai. Plus de 18 000 pharmacies sur les 20 000 présentes en France ont baissé leur rideau. Soit 90 % d’entre elles, un pourcentage qui a pu être dépassé dans certaines villes comme Ajaccio, Nice, Avignon, Mâcon ou Roanne.
Les manifestations organisées dans plusieurs communes ont rassemblé quelque 30 000 personnes, selon l’Union de syndicats de pharmaciens d’officine (Uspo) et la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). « Médicaments en pénurie, patients à l’agonie », « Pour continuer à soigner votre crève, on fait grève », pouvait-on lire sur des pancartes du cortège parisien parti de la faculté de pharmacie pour rejoindre le ministère de l’Économie.
« Nous ne sommes pas là pour nos tiroirs de caisse mais pour nos patients », assure, à l’AFP, Berthe Gokoyo, pharmacienne à Arnouville (Val-d’Oise) lors de la manifestation parisienne tandis qu’une de ses collègues, Isabelle Pailler, explique, au cœur du défilé limousin, perdre « une énergie folle chaque jour à tenter de trouver des médicaments » qui font défaut. « On doit interrompre le traitement de diabétiques parce qu’il nous manque un injectable, le Trulicity. On passe 1 h 30 à 2 h 00 par jour, avec mon équipe, à appeler les médecins, le CHU, les laboratoires ! », ajoute-t-elle.
« Une volonté de marquer le coup »
Une revalorisation des rémunérations dès 2025 des pharmaciens figure aussi en tête des revendications. Les syndicats estiment insuffisantes les dernières propositions de l’Assurance maladie liées aux négociations conventionnelles entamées fin 2023, notamment dans un contexte inflationniste. Ils espèrent se faire entendre alors qu’ils sont convoqués le 5 juin pour une « réunion conclusive » avec l’Assurance maladie, selon Philippe Besset, président de la Fédération des Pharmaciens d’Officine (FSPF).
Comme lors de la grande grève de 2014, Jérôme Koenig (USPO) souligne « une volonté de marquer le coup ». Les syndicats, qui souhaitent alerter sur les pénuries de médicaments, pointent aussi sur les fermetures d’officines, notamment dans les zones rurales. « En 10 ans, la France a perdu près de 2 000 pharmacies », écrivent les trois syndicats étudiants mobilisés – ANEPF (Association Corporative des Étudiants en Pharmacie de Tours), la FSPF, USPO – sur le site mobilisationpharmaciens.fr, qui répertorie l’ensemble des mobilisations en France. La demande d’une régulation de la vente en ligne est également mise en avant. Les syndicats exigent une « régulation adéquate » pour la « sécurité des patients et la stabilité économique des pharmacies ».
Enfin, Pierre-Olivier Variot, le président de l’UPSO, met aussi en garde contre les difficultés liées à la formation avec une réforme du troisième cycle des études de pharmacie qui tarde à aboutir, dans une vidéo publiée sur X (ex-Twitter). Les étudiants sont également mobilisés pour leurs futures conditions de travail.
Sur X, des étudiants de l’ACEPT (Association Corporative des Étudiants en Pharmacie de Tours) rappellent les demandes liées à l’amélioration des conditions de travail et à la réforme du troisième cycle : « En tant que futurs professionnels de santé, nous sommes résolus à défendre les bases de notre métier et à garantir la qualité et l’accès aux soins pour tous. »
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