Les « preneurs en otage » sont de retour. Ce mardi, les leaders de droite et d’extrême droite se sont lancés dans une surenchère de poncifs anti-grève pour tenter de décrédibiliser le mouvement fortement suivi dans les RER et trains de banlieue, à l’appel de la CGT cheminots, de SUD rail, rejoints par endroits par l’Unsa ferroviaire et FO cheminots.
« C’est insupportable qu’un certain nombre de privilégiés puissent prendre la France en otage très, très régulièrement », a attaqué sur Sud Radio le chef des sénateurs LR, Bruno Retailleau, en écho à sa tête de liste François-Xavier Bellamy, qui dénonçait « un service public confisqué par une petite minorité qui décide de tout bloquer ».
Sa concurrente à Reconquête, Marion Maréchal, a surenchéri, appelant à « durcir les conditions du droit de grève », « au minimum, au moment des vacances scolaires et des jours fériés dans la fonction publique », ce qui n’était pas le cas de ce 21 mai.
Interrogée sur cet emballement politico-médiatique, Sophie Binet a tenté de remettre un peu de rationalité dans les débats. « La CGT soutient ce mouvement en intersyndicale qui appelle le gouvernement à changer de méthode. Cela fait trois mois que nous lui demandons la tenue d’une table ronde consacrée à la préparation des JO. Aucune réponse de Matignon. On en aura peut-être une le 10 juin, mais au ministère des Sports. Sur ce sujet comme sur d’autres, le gouvernement ne sait pas négocier. Pire : il dénonce un PDG (Jean-Pierre Farandou, SNCF – NDLR) qui a réussi à signer un accord avec tous les syndicats. Il faut retrouver un vrai dialogue social », fait valoir la secrétaire générale de la Confédération.
« 2 000 euros pour tous »
En l’occurrence, à la SNCF, la CGT cheminots a justifié dans un communiqué les débrayages par une direction qui « n’a pas jugé utile d’avancer sa table ronde nationale (de négociations – NDLR) qui se tiendra le 22 mai, alors que nous sommes à une soixantaine de jours de l’événement », et que « les entreprises impactées directement ou indirectement par les JO ont déjà pris des mesures, soit unilatérales, soit négociées, depuis plusieurs semaines ». Selon le secrétaire fédéral SUD rail, Fabien Villedieu, la direction ne propose que 50 euros brut par jour travaillé entre le 26 juillet et le 11 août, puis durant les paralympiques (du 28 août au 8 septembre).
À la RATP, des accords catégoriels ont été signés il y a déjà une semaine, portant sur une prime JO de 1 000 euros brut en moyenne, pouvant aller jusqu’à 2 500 euros brut pour les conducteurs de métro et de RER, sur lesquels repose la majeure partie de l’offre de transport d’Île-de-France Mobilités durant les épreuves. « Les salariés auraient perçu quelque chose lors des négociations salariales de ce début d’année. Mais pas à ce niveau sans avoir posé le rapport de force », analyse Vincent Gautheron, secrétaire de l’union syndicale CGT RATP.
Faute de discussions en amont, les syndicats des agents hospitaliers de l’AP-HP ont eux aussi dû passer par des préavis de grève déposés pour l’événement. Si la direction propose 800 euros pour les salariés en catégorie C et 2 500 euros pour les médecins, l’intersyndicale dénonce « une prime discriminante » et porte « l’exigence de 2 000 euros pour tous ».
Les éboueurs de Paris viennent d’obtenir des revalorisations après des débrayages. Mais les rois du rapport de force vis-à-vis de leur employeur restent les policiers et gendarmes, avec leur prime concédée par le ministre de l’intérieur Gérald Darmanin allant jusqu’à 1 900 euros.