Sud Aveyron, envoyée spéciale.
Des tracteurs garés devant les grilles de l’hôpital. Samedi 20 avril, plus de 600 agriculteurs, soignants et usagers ont fait bloc à l’appel de l’intersyndicale CFDT-CGT-SUD pour exiger le maintien du centre hospitalier Émile-Borel à Saint-Affrique. Avant même l’arrivée de l’été, la température monte d’un cran dans le sud de l’Aveyron. Le 2 avril, plus de 500 personnes s’étaient déjà rassemblées dans une salle des fêtes pleine à craquer.
« Il y a le projet de construction d’un hôpital « médian » près de Millau, à trente minutes d’ici, mais on ne sait pas à quel horizon. Peut-être même ne verra-t-il jamais le jour, donc pas question d’abandonner celui de Saint-Affrique ! », tonne Henri Célié, cheminot retraité et porte-parole du Manifeste, le comité de défense de l’hôpital.
Dégrader pour mieux fermer
Dans ce bassin de vie enclavé de 25 000 habitants (dont plus de 8 200 à Saint-Affrique), l’Agence régionale de santé (ARS) aurait reporté sine die les 4,5 millions d’investissements promis pour rénover la structure. La priorité serait donnée au projet d’hôpital médian. De quoi raviver l’inquiétude : « Il y a un manque de transparence de notre direction et de l’ARS, dénonce Julien Franitch, secrétaire de la CFDT. Laisse-t-on notre hôpital se dégrader pour mieux le fermer ? Nous sommes en manque de personnel médical et paramédical. 55 % des lits de médecine générale et de soin de suite et de réadaptation ont fermé en 2023. »
En ce moment, une des salles du bloc opératoire est également inutilisable pour cause de problème de ventilation. Contactée par l’Humanité, l’ARS Occitanie n’a pas donné suite. Si la ville aux sept collines abrite un lieu de soins depuis le Moyen Âge, c’est en 1933 que le centre hospitalier a ouvert ses portes. Un pilier de l’offre de soins dans la région qui a déjà failli signer son arrêt de mort en 2003. Une lutte massive avait permis de conserver un temps certains services.
François Bryant, secrétaire de la section PCF du pays saint-affricain et membre du Manifeste, se rappelle des actions coup-de-poing : « On avait occupé le chantier du viaduc de Millau, il y avait eu des grèves de la faim. Pour garder l’hôpital, l’exception géographique avait été invoquée, mais elle est toujours valable aujourd’hui ! Avec le relief, on ne peut pas rouler très vite. Ce bras de fer dure depuis plus de vingt ans. »
À l’époque, cet élan de solidarité en béton armé avait même donné naissance à la Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et des maternités de proximité. « Certains nous appellent les “zozos” parce qu’on est tout le temps en train de revendiquer, mais avec une population âgée et rurale, se soigner reste un combat, surtout dans un désert médical », appuie, avec toute sa gouaille, le coprésident du Manifeste, Bernard Boullot.