C’est un revirement spectaculaire, à l’échelle de la sidération suscitée parmi les personnels de l’Éducation nationale. Deux jours après leur avoir annoncé, sans concertation aucune, qu’ils devront se passer, pour le restant de l’année scolaire, des moyens budgétaires alloués aux enveloppes d’heures supplémentaires dans les collèges et les lycées, Nicole Belloubet vient de faire volte-face.
« La ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse a donné instruction pour que, dès demain, les académies recouvrent les moyens budgétaires initialement notifiés afin de poursuivre l’attribution d’heures supplémentaires dans les établissements », peut-on lire dans un communiqué de presse, publié le 1er mai.
683 millions d’euros d’économies
Semblant ignorer être à l’origine de cette décision initiale de sabrer de nouveau dans les moyens des établissements scolaires, au nom des restrictions budgétaires annoncées par Bercy (683 millions d’euros sur les 10 milliards d’euros prévus pour 2024), Nicole Belloubet met en avant « la priorité donnée à l’Éducation nationale par le gouvernement, le Premier ministre » et par ses propres soins afin que « les établissements scolaires continuent à disposer des moyens de mener à bien leurs missions ».
Si les personnels de l’Éducation nationale ont dû avaler, ces dernières années, un certain nombre de couleuvres, celle-ci tenait encore du jamais-vu, à deux mois de la fin de l’année scolaire, et a suscité une vague de colère, dès son annonce par les rectorats, les 29 et 30 avril.
La suppression de ces enveloppes d’heures dédiées notamment à l’aide aux devoirs, à des actions de soutien pour éviter le décrochage des élèves en difficulté, à la rémunération des enseignants assurant des stages de remise à niveau durant les vacances, ou encore aux remplacements de courte durée, menaçait toute une organisation mise patiemment en place tout au long l’année par les établissements.
Ce revirement n’a pas apaisé la révolte des personnels et des syndicats qui y voient un nouveau signe de la politique à courte vue et de l’improvisation de l’exécutif face aux enjeux de l’Éducation nationale. Ces derniers se demandent désormais s’il y a bien encore un pilote dans l’avion.
Amateurisme et improvisation
« Marche arrière du gouvernement sur les heures supplémentaires. À quel niveau d’amateurisme et d’opportunisme électoral sommes-nous exactement ? Les mots finissent par manquer… Quand le gouvernement comprend que l’Education nationale, en fonctionnant sur des primes, scie la branche sur laquelle elle survit… », a ainsi fustigé la CGT Éducation sur son compte X.
Une réaction qui fait écho à l’indignation manifestée sur le réseau social par de nombreux enseignants. À qui il ne reste parfois que la dérision. À l’instar de cette enseignante d’allemand dans le Val-d’Oise, qui offre son interprétation de cet épisode catastrophique :
« Nous nous sommes fait prendre la main dans le sac à faire les poches des personnels qui s’investissent dans leurs établissements au service des élèves et ça s’est vu. Nous rendons donc l’argent, mais ayez confiance en notre volonté de recommencer tôt ou tard. Cordialement. »
La question se pose en effet : sur quels budgets, le ministère de l’Éducation nationale va-t-il désormais rogner pour trouver les 683 millions d’euros d’économies prévues par Bercy ?