« On observe une vraie méconnaissance des actions les plus basiques pour réagir en cas de catastrophe avec plus de 9 Français sur 10 qui n’ont pas à leur domicile un sac d’urgence déjà prêt en cas d’évacuation ». Un extrait d’un manuel survivaliste ? Non, un constat du nouveau rapport de la Croix-Rouge Française sur la préparation et la résilience face aux événements climatiques extrêmes.
Paru le 25 avril, synthèse de travaux d’experts, de retours d’acteurs de terrain et de personnes sinistrées, ce rapport fourni dresse un bilan des catastrophes naturelles et de leurs effets sur la population. Avec des points d’alerte sur les lacunes en termes de préparation des citoyens, quelques semaines avant la présentation du Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC).
« Les plus vulnérables sont les premières victimes »
Le ton de ce rapport tourné vers « la mobilisation des forces vives face aux événements climatiques extrêmes » est presque militaire. Canicules, sécheresse, feux de forêts, inondations, tempêtes : l’association dresse un état des lieux de ces événements extrêmes, dont la fréquence et l’intensité s’accroissent.
Si 27 % de la population s’y sentait exposée en 2015, la proportion est passée à 44 % en 2023. Sans surprise, « les personnes les plus vulnérables sont les premières victimes ». Personnes précaires, sans logement ou mal logées, population âgée… : du fait de leurs conditions de vie ou de leur isolement, ils sont aussi les plus difficiles à prévenir ou à localiser et leurs conditions de vie post-catastrophe sont davantage dégradées.
Par-delà les constats, un élément phare du rapport est de pointer le manque de préparation : seuls 40 % des Français ont suivi une formation récente aux gestes qui sauvent. Le sondage réalisé par l’association met en évidence que « 75 % d’entre nous ne se sentent pas préparés face aux inondations, 73 % face aux incendies de forêt, 59 % face à la canicule ».
Un bilan alarmiste, qui revient sur la nécessité de se préparer, mais aussi de « mailler tout le territoire français avec des stocks prépositionnés d’urgence (couverture, kits hygiène, eau, etc.) adaptés ». Une invitation à impliquer la population dans la journée nationale du 13 octobre dite « tous résilients face aux risques ».
Un fort élan d’engagement
D’autant que les difficultés matérielles ne sont pas les seules conséquences de ces phénomènes, qui peuvent déclencher, dans 20 à 50 % des cas, des troubles psychologiques. Le soutien aux populations touchées par ces catastrophes est donc crucial, mais insuffisant.
L’association souligne un fort élan d’engagement, particulièrement chez les jeunes, alors que « 7 personnes sur 10 se déclarent prêtes à proposer leurs services aux associations engagées dans l’accompagnement des sinistrés », et insiste sur le besoin d’aménager le travail pour laisser aux bénévoles des journées de mobilisation en cas de catastrophes naturelles.
Si la Croix-Rouge souligne des progrès en termes de politiques publiques, elle dénonce également la baisse des aides dont les associations font l’objet, alors qu’elles font face à des investissements nécessaires et à l’inflation, et à une « augmentation de plus de 55 % du cumul annuel de leurs heures d’intervention » en dix ans.
Parmi les dix propositions « aussi urgentes que faciles à mettre en œuvre » de ce document : former 80 % de la population aux gestes qui sauvent, mais aussi la constitution d’un plan « Grand Chaud ». Alors que le Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) doit être présenté sous peu par le gouvernement, ce rapport vient apporter un regard précieux sur la réaction à ces événements climatiques.
Le ministère de la Transition Ecologique indique qu’il « vient enrichir le nouveau plan d’adaptation dans sa phase de consultation qui va s’ouvrir pendant deux mois », et pointe l’enjeu « d’intensifier nos liens avec la Croix-Rouge, à leur demande à la nôtre, pour voir comment on peut travailler ensemble dans l’avenir. »
Le PNACC devrait reprendre certaines recommandations émises par la Croix-Rouge, selon le ministère, notamment « le ciblage des personnes vulnérables », ou encore la mobilisation des acteurs, afin de « créer un réflexe de l’adaptation dans la société française et de toutes les organisations avec cette dimension résilience et mobilisation des acteurs associatifs. » Le ministère a également indiqué réfléchir à « mobiliser des jeunes en service civique écologique pour faire face à des enjeux d’adaptation au changement climatique voire de gestion de crise. »
Toutefois, le champ couvert par le PNACC sera plus vaste, précise le ministère : « La Croix-Rouge traite son cœur de métier, la gestion de crise et la résilience, mais le plan national d’adaptation porte sur l’anticipation, la prévention des risques. » Avec des choix politiques et budgétaires en cohérence avec les ambitions affichées ? La réponse ne devrait plus tarder.