Commune de départ : Fontvieille / Type de balade : Pédestre / Difficulté : Facile / Durée : 1 h + visite du château / Distance : 3,5 km
« Je rêvais de rester là tout le jour, comme un lézard, à boire de la lumière, en écoutant chanter les pins. » Alphonse Daudet fit de Fontvieille son refuge la plus grande partie de sa vie et c’est sur ses traces que nous pénétrons dans ce très joli village provençal, fraîchement débarqué de la petite gare. Rendez-vous à l’office de tourisme, avenue des Moulins. Car c’est précisément ce qui nous amène ici. Un moulin, celui qui pendant des années fut l’univers tout entier de l’écrivain Alphonse Daudet, qui nous a tant régalés avec ses « Lettres de mon moulin ». Celui du « Secret de maître Cornille », celui dans lequel aussi il eut l’idée géniale de soumettre à la tentation un prêtre trop gourmand, un soir de Noël…
Nous empruntons le sentier des Quatre Moulins, accessible gratuitement tous les jours de l’année, balisé et jalonné de bornes d’interprétation. Le premier moulin que nous croisons est le moulin Sourdon, le plus vieux du quatuor, également connu comme « le moulin tombé » car privé de ses ailes. Il a vu le jour en 1791. En activité jusqu’au XIXe siècle, il a été entièrement restauré en 2015. Daté du début du XIXe siècle, le moulin Ramet est le suivant. Son activité cessera dans les années 1900.
Vient ensuite le moulin Tissot-Avon, qu’Alphonse Daudet appréciait particulièrement en raison de sa proximité avec le château de Montauban, situé à un kilomètre de là, où il rendait visite à ses cousins, les Daudet-Ambroy. Après la mort de son dernier meunier, le moulin Tissot-Avon tira sa révérence en 1905, avant d’être à son tour restauré en 2016.
La vérité fantasmée de Daudet
Nous avons gardé le meilleur pour la fin. Dernier moulin du parcours, le moulin Ribet, ou Saint-Pierre, ou encore tout simplement moulin d’Alphonse Daudet. C’est un peu comme on veut, puisqu’il porte les trois noms. Bâti en 1814, il cessera de fonctionner cent ans plus tard, en 1915, année où le blé fut réquisitionné pour la guerre et où sa machinerie qui avait broyé tant de bons grains pendant plus d’un siècle tomba en panne. En 1935, la Société des amis d’Alphonse Daudet entreprit de le restaurer. Il ne se visite qu’en saison, uniquement d’avril à novembre. Récemment rénové comme ses voisins, il accueille dans son sous-sol un très joli musée Daudet, illustrant les œuvres et les souvenirs de l’écrivain.
Il est aussi le seul à posséder une petite salle en rez-de-chaussée, dont Daudet fit le centre de son œuvre sans y avoir jamais vécu, contrairement à ce qu’il écrivit : « Je suis si bien dans mon moulin. Moi je me réserve la pièce du bas, une petite pièce blanchie à la chaux, basse et voûtée comme un réfectoire de couvent. C’est de là que je vous écris, ma porte grande ouverte au bon soleil. » Il s’en servira aussi pour dresser le décor du drame de maître Cornille : « Un mauvais lit, quelques guenilles, un morceau de pain sur une marche d’escalier, puis dans un coin, trois ou quatre sacs crevés d’où coulaient des gravats et de la terre blanche. C’était là le secret de maître Cornille. »
Des lettres écrites au gré du vent
C’est lors d’une visite à Maillane, sans doute autour de 1860, à son grand ami le poète Frédéric Mistral, autre gloire provençale, que le jeune journaliste Alphonse Daudet s’éprend de la région, du village et de ses moulins qui prêtent leurs ailes au mistral. Né en 1840 à Nîmes dans le Gard, Daudet restera fidèle toute sa vie à ses racines méridionales qui illuminent son œuvre, bien qu’il ait choisi de vivre à Paris pour des raisons purement professionnelles.
Les « Lettres de mon moulin » paraissent en 1869. C’est un recueil de nouvelles composé de 24 lettres. Parmi les plus connues, « la Chèvre de monsieur Seguin », bien sûr, ou encore « le Curé de Cucugnan » et « la Mule du pape ». L’ouvrage s’ouvre sur un avant-propos : l’acte de vente par lequel le narrateur achète son moulin. Un faux, puisque Daudet n’a jamais été jusqu’à l’acquisition de la bâtisse, même s’il en eut souvent grande envie. Classé Monument historique, il jouit depuis de la vie éternelle d’un moulin que la littérature lui a accordé grâce au talent de conteur d’Alphonse Daudet.
Lire Daudet, c’est déjà voyager. C’est humer à chaque page les parfums de Provence, c’est en boire le ciel azuréen, c’est finir par en prendre l’accent chantant et enchanteur quand, doucement, on referme le livre.
À à peine un kilomètre des moulins, le château de Montauban fut, durant près de trente années, le lieu de villégiature, de calme et de repos dont l’écrivain avait besoin pour trouver l’inspiration des pages mémorables qu’il nous a léguées. Lors de ses séjours à Fontvieille, seul puis en compagnie de son épouse Julia, il croise la route de nombreux habitants aux différentes histoires, dont il s’inspirera pour ses contes. Cette superbe bâtisse, composée d’une façade monumentale du XIXe siècle accolée à un mas du XVIIIe, était la demeure de son cousin Louis Daudet et de son épouse Octavie Ambroy. Le château de Montauban est aujourd’hui un musée culturel et historique dédié notamment aux découvertes archéologiques du territoire.
Château de Montauban, chemin de Montauban, 13990 Fontvieille, plein tarif : 5 euros, tarif réduit : 3,50 euros