Le gouvernement avait promis de faire du droit des femmes une grande cause nationale. Mais en voulant à tout prix réformer l’Aide médicale d’Etat (AME), il met les plus précaires d’entre elles en danger et limite leur accès aux soins, alertent plus de vingt associations de défense des droits des femmes et des étrangers, dans un communiqué publié mercredi 17 avril.
Deux mesures destinées à durcir les conditions d’accès à ce dispositif, qui ont été confirmées le 14 avril sur France info par le ministre délégué chargé de la Santé, Frédéric Valletoux, nourrissent l’inquiétude : la “reconjugalisation” de l’AME, c’est-à-dire son conditionnement aux revenus du conjoint, et le renforcement du contrôle des papiers du demandeur.
« Le profil type des personnes que ces mesures vont éloigner des soins sont les femmes étrangères victimes de violence, Ce sont déjà des catégories qui ont du mal à accéder à leurs droits, parce que bien souvent, la violence s’exerce dans un contexte coercitif global”, explique le collectif associatif.
“Aucune analyse des risques de cette mesure pour les femmes”
Privées de leurs papiers, ou interdites d’autonomie économique, ces femmes risquent, avec cette réforme, de se voir privées de la possibilité de voir un médecin, de faire constater les violences, de se soigner, et d’appeler à l’aide. « Bloquer l’accès aux soins de santé constitue déjà une tactique de violences conjugales bien établie et documentée. En privant les femmes de leur autonomie, cette mesure fera augmenter ce type de violences, ainsi que le niveau de précarité des femmes sur le territoire français”, explique le Dr Angélie Pham, Présidente de Women for Women France, une des organisations signataires.
Être en capacité de décider seule pour son corps est pourtant au cœur de l’égalité entre les hommes et les femmes. C’est d’ailleurs cet argument qui avait fini par contraindre les autorités à déconjugaliser l’Allocation adulte handicapé (AAH). Après des mois de campagne, il avait fini en octobre 2023 par se ranger à l’avis des militants qui dénonçaient comme infantilisant et dangereux le conditionnement de l’octroi de l’AAH aux revenus de leurs conjoints.
Le même constat semble ne pas fonctionner pour les femmes étrangères. « Cela montre que le gouvernement français ne comprend pas encore tout à fait la complexité du contrôle coercitif, et n’entreprend aucune analyse de risques concernant la sécurité des femmes et l’élaboration de ses politiques”, a commenté Sarah McGrath, Directrice Générale de Women for Women France.
Le gouvernement est bien conscient des conséquences que ses décisions pourraient avoir sur la santé et la vie des femmes. Avant de poser le problème sur la place publique, les associations ont commencé le 14 mars par envoyer un courrier d’alerte à Matignon, avec copie aux ministère concernés. Ce dernier est jusque-là resté sans réponse.
Il faut dire que les nouveaux obstacles mis à l’obtention de l’AME sont un cadeau fait à la droite et à l’extrême droite, obsédées depuis des années par le dispositif. Ils correspondent à la promesse faite par le gouvernement, au moment des débats sur la loi Asile et Migration, de réformer l’AME, sans pour autant la supprimer.