Une nouvelle étape dans la casse du statut de fonctionnaire. Mardi matin, le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques Stanislas Guerini avait réuni les organisations syndicales pour discuter d’une future réforme au titre lourd de sous-entendus « l’efficacité de la fonction publique ». Mais le raout a tourné court.
« Tous les syndicats ont contesté la méthode : on nous a envoyé un document lundi, en fin d’après-midi, ne nous laissant pas le temps de consulter notre base, tacle Natacha Pommet, secrétaire générale de la fédération CGT des services publics. Nous avons essayé de demander que le calendrier, très contraint, avec conclusion des réunions pour le 20 juin, soit desserré. Cela nous a été refusé. Il n’y a donc pas eu d’ouverture des discussions. » Moins de cinq ans après la loi de transformation de la fonction publique, qui a imposé un allongement du temps de travail et fusionné les grands corps de l’État, c’est bien un nouveau traitement de choc qui attend les agents du service public.
Guerini cite… Thorez
Si le gouvernement prétend « réaffirmer les fondamentaux du statut », comme il l’écrit dans le document transmis aux organisations syndicales, c’est tout le contraire qui risque de se passer. Une remise en cause des trois catégories de fonctionnaires, A, B et C, qui seraient « en décalage croissant avec la réalité », se profile. « Ils veulent passer à une fonction publique de carrière, soi-disant pour renforcer son attractivité, explique Natacha Pommet. Pour nous, c’est une ligne rouge. On voit que le gouvernement est influencé par les employeurs territoriaux, qui disent avoir besoin de plus de flexibilité. Or, si les salaires augmentaient, nous aurions moins ce problème pour susciter des vocations. Ces mêmes arguments avaient déjà été mis sur la table au temps de la loi de transformation de la fonction publique. On nous parle aussi d’absentéisme, d’absence d’efficacité… Or, nous avons déjà des dispositifs existants pour lutter contre ça. »
Sur la question du salaire au mérite, évoquée à de multiples reprises dans la presse par le ministre et officiellement mise sur la table, FO la juge ainsi « totalement contradictoire avec la mission de service public, l’égalité des droits, l’égalité de traitement des usagers, ainsi qu’avec les principes fondateurs du statut général des fonctionnaires ». Pour tenter de la justifier, le ministère utilise même une citation de Maurice Thorez, secrétaire général du PCF et ancien ministre de la Fonction publique en 1945, lequel disait alors qu’ « il fallait étendre les primes de rendement individuelles et collectives qui permettr (aien) t de “proportionner” la rémunération du fonctionnaire (…) à l’intensité et à l’efficacité de l’effort ».
Un contresens total pour Natacha Pommet : « C’est comme lorsque Emmanuel Macron s’inspire du Conseil national de la Résistance. Cet argument est complètement sorti de son contexte. » Rien, en revanche, n’a été annoncé en matière de dégel du point d’indice ou de revalorisations salariales, malgré la mobilisation intersyndicale le 19 mars. Comme le rappelle la CFDT dans un communiqué : « la priorité, après deux années d’inflation terrible (…) c’est, pour les collègues, de pouvoir vivre de leur travail ». Mais le gouvernement trace sa route. Une prochaine réunion est prévue le 14 mai.