Alors que le déficit budgétaire est plus important que prévu, la majorité qui cherche à faire des économies à tout prix a commencé à rogner sur certains budgets verts. Une tendance qui inquiète les plus écolos des élus Renaissance.
Pas d’état d’âme. Entre la dette et la planète, le gouvernement a tranché. Il y a un mois, pour ne pas aggraver un déficit qui s’annonçait déjà important, Bercy annonçait que le Fonds Vert, un dispositif à destination des collectivités locales pour financer la transition écologique, serait délesté de 400 millions d’euros.
Parallèlement, le budget de Ma Prime Renov, ce soutien aux particuliers qui veulent isoler leur logement, a fondu d’un milliard. Deux mauvaises nouvelles qui font craindre aux associations écologistes que les chiffres budgétaires rendus publics la semaine dernière ne soient prétexte à de nouveaux renoncements.
L’environnement, victime collatérale numéro 1 de la crise ?
Élisabeth Borne est furieuse face aux reculs du gouvernement
Jeudi matin pourtant, Gabriel Attal était reçu en grande pompe au Muséum d’Histoire naturelle pour annoncer le plan de transformation écologique de l’État. Plus de bio dans les cantines des administrations, moins de dépenses en carburant et moins de consommation d’énergie…
L’État se veut exemplaire. Mais ça, c’était avant. Ces mesures ont été actées il y a des mois. Depuis, le gouvernement a sorti la gomme.
“Élisabeth Borne est furieuse car elle estime que l’on a détricoté sa planification écologique”, nous confiait cette semaine un député qui lui est proche et que les reculs gouvernementaux inquiètent. “La crise budgétaire nous a obligés à raboter sur les sujets environnement et Attal ne donnera plus aucun signal de ce côté-là”, nous assurait ce même député, pilier de l’aile gauche de Renaissance.
“On ne marquera pas de points avec l’écologie”
Pour lui, la pensée de l’actuel locataire de Matignon se résume en quelques mots : “On ne marquera pas de points avec l’écologie donc ça ne sert à rien de s’agiter. Du coup, le Premier ministre fait un 20 heures sur le travail et pas sur l’écologie. Le problème, c’est qu’il ne raisonne qu’en termes de séquence. Mais si demain, on a une vague de chaleur ou des feux de forêt, on va encore se retrouver en défense à se dire qu’on n’a pas été bons”.
Récemment, la loi sur l’énergie et le climat qui devait tracer les grandes orientations énergétiques de la France en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre a été reportée sine die.
Cette semaine, les Écologistes ont bien tenté de faire voter en commission des Affaires économiques un texte imposant des objectifs chiffrés mais il a été entièrement réécrit par les députés Renaissance qui ont ainsi réduit la part des énergies renouvelables dans les projections. “Ils ont aussi refusé d’inscrire des objectifs fermes pour la baisse des gaz à effet de serre, ils voulaient imposer des termes comme tendre vers mais ils ont été mis en minorité par un sous-amendement d’Horizons qui a réimposé des objectifs”, nous raconte Julie Laernoes, la députée de Loire-Atlantique à l’origine du texte.
Celui-ci sera discuté dans l’hémicycle le 4 avril mais les écologistes ont peu d’espoir qu’il soit voté dans sa version initiale.
“Dette budgétaire et dette climatique”
Pour le député de la majorité Pierre Cazeneuve, le gouvernement ne renonce à rien. L’élu des Hauts-de-Seine aurait certes préféré que “l’on ne baisse pas le budget du Fonds Vert car cette aide aux collectivités a un impact énorme”.
Mais il se veut confiant : “La lutte contre le dérèglement climatique reste une priorité”, nous assure-t-il, parlant même de budget historique. “Je suis attaché aux deux dettes, conclut-il, la dette budgétaire et la dette climatique qui sont très fongibles. On doit aux générations suivantes de laisser un pays avec moins de dette possible”.
Mais Pierre Cazeneuve reconnaît aussi que la mise sur pause de la loi énergie climat n’est pas un bon signal. C’est pourquoi avec trois autres députés, Maud Brégeon, David Amiel et Antoine Armand, ils préparent leur propre texte. Mais rien ne sera déposé avant le 9 juin, date des élections européennes, preuve que le sujet est électoralement sensible pour la majorité qui préfère jouer la prudence.
La tentation Glucksmann
Après la crise agricole et la mise sur pause du plan Ecophyto visant à réduire de moitié l’usage des pesticides d’ici 2030, l’ambiance n’est donc pas au vert.
Au sein de Renaissance, un ancien ministre s’en inquiète aussi en termes électoraux : “Il ne faut pas lâcher le thème de l’écologie. Si on dit : on est désolé pour le Green Deal, pardon pardon pardon !’ Ça ne va pas aller car on voit bien qu’au sein de notre électorat il y a une tentation Glucksmann. Il faut que nous parlions écologie pour reconquérir notre électorat jeune et urbain qui attend un discours sur ce thème. De plus, on ne gagnera pas la présidentielle seulement avec les vieux.”
Mais les choix budgétaires ne sont jamais sans conséquences électorales.