De déclaration en déclaration, Bruno Le maire dessine depuis quinze jours les contours – à la serpe – de la politique de rigueur qui sera, plus personne n’en doute, la ligne directrice de cette deuxième moitié de quinquennat. Après les 10 milliards d’annulations de crédits en 2024, imposés par décret fin février, le ministre de l’Économie a alourdi la facture ce 6 mars, prévoyant pour 2025 « au moins » 12 milliards d’euros d’économies supplémentaires.
La fuite en avant austéritaire, portée par l’épouvantail de la dette, est lancée. « Je vous rassure, on est très loin de l’austérité », a minoré, dans son entretien au Monde, le locataire de Bercy. Pour lui et ses compères du CAC 40, en pleine euphorie boursière, c’est sans doute juste. Sûrement pas pour le reste des Français.
Cette purge, annoncée courageusement par voie de presse, relève déjà, en soi, du scandale démocratique. L’opposition de gauche, à l’instar des institutions financières, dénonçait lors du débat parlementaire des prévisions de croissance hors-sol. Chacun peut constater qu’elle avait raison. Et que le gouvernement, après avoir dégainé un énième 49.3 pour étouffer toute contestation, n’avait qu’un objectif en tête : sauter l’obstacle de l’Assemblée et du Sénat pour dicter sa loi budgétaire à coups de décrets. Nous y voilà.
Véritable réflexe pavlovien des néolibéraux à chaque ralentissement de l’économie, ce virage de la rigueur est un choix mortifère, mais ô combien macroniste. Ne nous y trompons pas : derrière le paravent de l’équilibre budgétaire, qui pourrait s’obtenir par des réformes fiscales bien plus justes, ces milliards sabrés dans les budgets de l’écologie, de l’emploi ou encore de l’éducation nationale servent avant tout la logique de dérégulation portée avec entêtement par la minorité présidentielle.
À l’heure de la crise environnementale et de l’explosion des inégalités, ce détricotage de l’État par les pères la rigueur relève de l’anachronisme idéologique. Et d’un contresens politique irresponsable, qui risque de coûter cher aux Français comme à la planète.