Le Biterrois, nouveau responsable départemental du RN, tient à clarifier sans équivoque la position de son parti à l’égard du couple Ménard. Cela notamment après les sorties médiatiques du maire de Béziers concernant le positionnement du RN sur la Russie.
Biterrois, responsable commercial dans l’informatique, Julien Gabarron, 43 ans, a aussi été à la tête du bar Le Plaza pendant une dizaine d’années. Guidé par les valeurs de la droite sociale gaulliste, un temps encarté à l’UMP, il a rejoint le RN en 2021, jugeant que le parti incarne le mieux aujourd’hui “la droite classique.”
Quelles sont vos ambitions politiques ?
Je suis un maillon de la chaîne, je me suis engagé pour une cause, sans ambition particulière, et je fais une proposition de service à mes camarades du Rassemblement National. Avant d’avoir une ambition, j’ai une mission : faire en sorte que le RN soit le plus fort possible sur le département. On a des élections très importantes en juin (les Européennes NDLR). En fonction de ce que j’arriverai à faire en tant que délégué départemental, on verra si je suis appelé par les électeurs. Sur l’ouest Hérault, on a un socle électoral qui est très fort : il faut arriver à parler à ces électeurs, qui ont peut-être été un peu troublés, ici à Béziers. Et on verra après, s’il y a une ambition qui vient. Ma motivation politique n’est pas basée sur l’ambition. Ma vie, elle est faite, je suis épanoui, je n’ai pas besoin de la politique pour vivre, je fais ça de manière bénévole. Soit j’ai des résultats et je pourrai prétendre à faire autre chose. Soit ça ne fonctionne pas et je ne m’accrocherai pas à ça. Mais j’espère un très gros score aux Européennes, en faveur de Jordan Bardella.
Vous menez pleinement cette campagne électorale ?
Oui. Elle commence ce 3 mars à Marseille, on fait un grand meeting avec Jordan Bardella et Marine Le Pen. On attend 6 000 personnes. On est le seul parti au niveau national et local à animer cette campagne.
Vous avez dit que les électeurs biterrois du RN ont été troublés… Robert Ménard s’est par ailleurs exprimé cette semaine sur BFM pour signifier son désaccord complet avec le RN sur certains points, il a aussi rappelé qu’il ne voterait pas pour le RN aux Européennes. Quelle est votre réaction ?
Sur cette intervention, on n’est pas à une outrance près. Mais qui parle ? Le Robert Ménard du premier mandat, du second ? Il passe beaucoup de temps sur les plateaux… Sur le fond, il avait déjà acté clairement les distances qu’il prenait avec le Rassemblement National en novembre dernier (en s’exprimant sur Jordan Bardella NDLR). Quant à ses propos sur la crise agricole (et l’opportunisme politique du RN sur ce sujet NDLR) : on a deux députés qui font un travail formidable sur l’agriculture. On a aucune leçon à recevoir sur l’implication du RN sur le monde agricole.
Et quelle est la position du RN départemental à l’égard des Ménard, RN qui avait jusqu’ici les avait soutenus directement ou indirectement en ne positionnant pas de candidat en face ?
Ce n’est pas une position départementale, je suis la voix du RN, du siège, de Jordan Bardella ici sur le secteur. Le positionnement du RN s’est fait en réaction aux positions de Robert Ménard. Mon prédécesseur (Frédéric Bort NDLR) et moi-même, on a toujours dit qu’on était prêt à discuter avec Robert Ménard, à clarifier nos positions ensemble et pourquoi pas, continuer un partenariat. Parce que l’élection de Robert Ménard, c’est le soutien du RN. C’est pas l’inverse. Entre le premier et le deuxième mandat, il a pris un virage macroniste. Mais il n’a pas été nommé au gouvernement. Aujourd’hui il a clarifié sa position, je pense que le divorce est consommé.
Cela signifie qu’il y aura un candidat RN lors des prochaines échéances électorales, et en particulier pour les élections municipales à Béziers ?
On y travaille. Ça ne sert à rien de se prononcer maintenant. On est encore loin de ces échéances. On est pleinement concentré sur les Européennes, si on arrive à faire un score fleuve ici aux Européennes, ça lèvera des vocations. Mon but est d’aller au-delà de Béziers, dans tout le département, pour identifier des candidats potentiels. Il y a énormément de monde qui nous rejoint (la 6e circonscription compterait quelque 200 adhérents, le département 1500 NDLR). Et pour pouvoir ancrer notre implantation locale, c’est important qu’on ait des élus locaux. Sur Béziers en particulier, le divorce est consommé. C’est donc une volonté du siège de marquer le point de rupture. Il fallait absolument réagir.
D’où un tract distribué dans le Biterrois en ce début d’année, signifiant “Si vous votez Ménard, vous votez Macron”…
C’est un besoin d’information. Sur Béziers, on considère qu’il y a jusqu’à 16 000 électeurs qui ont voté et pour Marine Le Pen et pour Robert ou Emmanuelle Ménard. Il faut qu’on informe ces personnes-là que lorsqu’elles votent pour Robert ou Emmanuelle Ménard, elles ne sont plus sur les valeurs du RN. Et il n’y a pas d’aventure personnelle, tout passe par une communication très forte avec le siège. Cette communication en réaction avec Robert Ménard s’est faite naturellement, en validation avec le siège du parti et sa direction générale. Ce n’est pas une initiative départementale sur un coup de tête. Et ce n’est pas une attaque, c’est une clarification.
Mais on n’entend pas Marine Le Pen défendre la même position aujourd’hui…
Je pense qu’elle a d’autres sujets à traiter. Il vaut mieux qu’elle parle aux Français, de nos lignes directrices, des propositions concrètes, etc.
Plusieurs conseillers municipaux biterrois, dans la majorité de Robert Ménard, sont adhérents du RN. Que leur dites-vous ?
Je suis en contact avec eux, ils sont surpris. C’est toujours le choix de la raison ou le choix du cœur. Aujourd’hui, ils sont dans une majorité, ils ont fait confiance à Robert Ménard, ils sont aussi un peu désappointés. Ce n’est pas mon rôle de leur demander de démissionner ou de prendre position. Mais je suis là pour les informer. C’est une fin de mandat. Moi je ne m’occupe pas de ce mandat-là, je suis dans l’après 2026.
Robert Ménard : “On n’a jamais été marié”
“Pour qu’il y ait divorce, il faudrait qu’il y ait eu un mariage”, réagit Robert Ménard. “Or, on n’a jamais été marié. On n’a jamais appartenu au RN, on ne leur demande rien. Toutefois aux dernières présidentielles, ils étaient assez contents qu’on ait appelé à voter pour Marine Le Pen, au premier et au second tour. Je le mets au défi de trouver un autre homme politique qui l’ait fait en dehors de son parti. Et on n’a jamais caché nos désaccords. Leur positionnement sur les questions économiques et sociales ressemble plus à ceux de LFI qu’à ceux de la droite. Sur le plan international, ils ont un vrai tropisme russe que nous n’avons jamais eu. Car nous avons défendu les droits de l’Homme dans le monde entier et en Ukraine, il y a un agresseur et un agressé. Le reste, c’est du jeu politique, ils changeront au gré des besoins et des nécessités électorales. Nous ne faisons rien d’autre que de dire ce que nous pensons sans nous préoccuper de ce qu’en pensent les autres. C’est notre liberté de n’être dans aucun parti. C’est aussi une faiblesse car on est seuls par rapport aux forces politiques.” “Et s’ils veulent présenter un candidat (le RN n’a pas positionné de candidat face aux Ménard depuis 2014 NDLR), ils le font. On n’a pas d’accord. Il n’y a pas d’échanges, de discussions ou de tractations. Par ailleurs, Julien Gabarron ne s’est jamais présenté à moi. Et je ne suis pas sûr que son sentiment reflète celui des militants du RN… Il a besoin d’exister. Mais je crois que la raison l’emportera tant au niveau local que national.”
“Je le recevrai sans problème”
“Et puis ce garçon n’a pas mieux à faire ? Les gens ont besoin d’être tous plus divisés ?”, ajoute encore le maire de Béziers. “Moi, j’ai d’autres soucis en tant que maire de Béziers et président du Biterrois. Ça, c’est juste le jeu de la politique.” Un jeu que Robert Ménard sait également bien pratiquer ! “Je gère la ville et je fais de la politique à partir de mon expérience de la gestion de tous les jours”, explique-t-il. “Je recevrai Julien Gabarron, comme tous les responsables politiques, sans problème.” À bon entendeur.