Alors que le nombre de demandeurs explose dans l’habitat social, que les mises en chantier chutent dans tous secteurs du logement, dessinant de sombres perspectives, la collectivité veut agir sur un ensemble de leviers et favoriser la transition énergétique, via le plan Habitat durable.
Le logement ne relève pas des compétences de la Région. Mais comment ne pas agir face “à la situation particulière” de l’Occitanie, confrontée à une croissance démographique sans égale. Comment rester inactif face à l’effondrement de la construction neuve – “22 à 25% de baisse entre 2022 et 2023” -, véritable fabrique de “mal-logés”, ou encore face aux “mesures d’économie envisagées” par le gouvernement sur le dispositif MaPrimeRénov’. “Je suis inquiète”, a confessé à ce propos la présidente de la Région, ce jeudi.
Ce n’est pas à un plaidoyer pour une politique, le plan Habitat durable de la Région voté en décembre dernier, que s’est livrée Carole Delga. Mais à un désastreux constat. Celui d’une profonde et multiple crise à laquelle l’Occitanie est confrontée, aux conséquences sociales, sur l’économie et l’emploi, auxquelles ce plan est un bout de réponse, à hauteur de 150 millions d’€ sur deux ans.
Crise de la construction
Les mises en chantier de logements neufs sont en recul, en ce début d’année, de 20 %. “Moins 30 %, pour les permis de construire accordés”, observe Frédéric Carré, le président de la branche Occitanie de la Fédération française du bâtiment (FFB). “Le besoin de logements sociaux était de 1,6 million en 2017, en France, il est passé à 2,4 millions en 2023”, reprend Carole Delga. On en a construit l’an passé dans nos treize départements quelque “8 400. Rien par rapport au besoin, souffle Sylvie Chamvoux, directrice régionale de la Fondation Abbé-Pierre. On atteint quasiment les 200 000 demandeurs. 2023 restera comme l’année de l’explosion de la crise du logement, il y a une grande nécessité de se mobiliser tous.”
Ce jeudi, dans un centre de formation d’apprentis du BTP toulousain, Carole Delga a contractualisé avec la FFB un dispositif de soutien à la filière (ci-contre), pour le volet économique et l’accompagnement de sa propre transition. Elle a surtout profité du moment pour détailler sa volonté d’être “très volontariste” sur ce chapitre du logement, donc, même si sa collectivité n’est pas un acteur décisif d’une compétence qui est avant tout celle de l’État. Elle veut aider à “plus de logement, mieux de logement. Le quantitatif, mais avec le qualitatif : écomatériaux, consommation la plus réduite possible d’énergie, une esthétique de l’acte constructif”, a notamment listé la patronne de l’exécutif régional.
“Vivre dignement”
Son plan Habitat durable met d’ores et déjà en œuvre quinze actions, qu’une deuxième phase viendra enrichir à la fin du printemps, après une concertation avec les institutionnels, les professionnels et les citoyens. Le montant principal, plus d’un tiers de l’enveloppe, soit 62 M€, va à l’amplification du réemploi sur les chantiers, en favorisant l’approvisionnement des matériauxpar l’économie circulaire et le bon usage de l’eau. Suivent, dans cette veine de la transition énergétique qui constitue le cœur du plan, 47 M€ d’aides dédiés à la massification de la rénovation thermique des immeubles collectifs.
Un contrat de filière avec le bâtiment
La Région a signé, après plusieurs années de travaux et pour une durée de cinq années, un contrat de filière avec la Fédération régionale du bâtiment et la Capeb d’Occitanie. Un contrat qui est présenté comme un “amortisseur de crise” par Frédéric Carré, le président régional de la FFB, en “ces temps difficiles”. Après les coups d’arrêt liés au Covid-19 puis à la flambée du coût des matériaux, le troisième secteur économique régional (11 milliards d’€ de chiffre d’affaires, 72 000 entreprises employant 160 000 actifs) voit se dessiner un “nouveau trou d’air l’an prochain”, pointe Frédéric Carré, lié aux baisses des mises en chantier et des permis de construire. “On a perdu 1 500 emplois sur la région. On pourrait en perdre, si rien n’est fait, 5 000 ou 7 000 de plus .”
Sur cinq ans, le contrat accompagnera en 35 mesures la filière dans sa transformation écologique, technologique et numérique et l’adaptation des compétences.
Le reste couvre l’aide aux collectivités, y compris une assistance technique, la lutte contre les logements vacants, comme la formation aux métiers de la transformation écologique, la naissance d’un campus régional dédié à ceux-ci, qui prendra place à Montpellier d’ici 2027. Des leviers, une boîte à outils au montant qui n’a rien d’anodin, à imaginer comme autant de marchepieds pour faire plus et de meilleure qualité. “Je veux m’assurer que chacun de nos concitoyens puisse vivre dignement, dans un logement décent.”