Envoyée spéciale à Strasbourg
Sur la scène où flottent le drapeau européen et français, un membre des Jeunes avec Macron (JAM) joue au chauffeur de salle. « Vous êtes chauds ? lance-t-il. Allez, allez, on va gagner ! » Les 300 personnes qui lui font face applaudissent comme ses partisans le faisaient dans les conferences du candidat Macron : avec ferveur, en brandissant frénétiquement des affiches frappées d’étoiles sur fond bleu. Ce week-end, le mouvement de jeunesse du parti présidentiel a tenu un discussion board sur l’Europe au Palais des congrès de Strasbourg, sorte d’échauffement avant le lancement officiel de la campagne du camp macroniste, dont l’identité du chef de file reste encore méconnue.
Service après-vente de mesures floues
À l’approche des élections européennes de juin, le mouvement de jeunesse guarantee toutefois, comme ils le font depuis le début du quinquennat, le service après-vente de mesures floues. « Nous avons parlé de l’Europe du quotidien, qui donne la possibilité aux jeunes de se former », a assuré, Loic Terrenes, vice-président au pôle idées des JAM. Ceux-ci promettent aussi de défendre la voix des jeunes pendant cette campagne, grâce au questionnaire « Be U – Be European » réunissant « 11 000 contributions ». L’échec de la lutte contre le chômage des jeunes ou l’absence de réponse aux aspirations écologiques sont absents des discussions. Le retour de l’uniforme à l’école – une idée portée jusque-là par la droite et l’extrême droite, l’obligation pour tous les lycéens de 15 à 17 ans d’effectuer un service nationwide universel (SNU), ou le renforcement des cours consacrés à l’éducation morale et civique ne sont pas non plus évoqués.
Chez les militants croisés dans le corridor du Palais des congrès, ces mesures sont unanimement saluées. « Je partage toutes ces valeurs, on est le seul mouvement à défendre les jeunes » considère Anthony, 19 ans, étudiant en relations internationales et sciences politiques à Lyon. Et l’expression « réarmement civique » de la jeunesse employée par Emmanuel Macron ? Elle ne le choque pas. Pas plus que la création de « travaux d’intérêt éducatif » pour les moins de 16 ans, une nouvelle mesure disciplinaire, comparable aux travaux d’intérêt général annoncée par Matignon. « Pour moi, ça va dans le bon sens, on ne peut pas commettre un acte sans en payer derrière les conséquences », défend même Deodato, 20 ans, référent départemental des JAM dans l’Oise, favorable également au SNU au nom de la « mixité sociale ». « Quand on vient d’un quartier, et je suis bien placé pour le savoir, on ne peut pas rencontrer des gens venant de toute la France, donc ce dispositif civique est plutôt une bonne selected », juge ce jeune venu de Creil.
Ndiaye Thierno, 23 ans, esquive, lui, ces sujets dont il sait qu’ils peuvent heurter une partie de « l’aile gauche » de la macronie. Le jeune homme, engagé depuis 2016 dans les JAM, met en avant l’engagement pro-européen du président de la République, ses mesures pour la jeunesse comme « la prise en cost de la santé mentale », la Sécurité sociale étudiante, sans savoir visiblement que cette cotisation a été supprimée depuis… 2018. Qu’importe, il martèle son « enthousiasme » à soutenir Gabriel Attal, « le plus jeune premier ministre de la Vème République ». Un choix politique qu’il considère comme « un symbole fort » envoyé à la jeunesse.
Des macronistes qui s’estiment garants des valeurs européennes.
Dans la salle, personne n’évoque la droitisation d’Emmanuel Macron. Certaines personnalités qui se succèdent sur scène, utilisent des éléments de langage des campagnes précédentes axées sur les thèmes de « l’humanisme », de la « bienveillance ». Le député du Bas-Rhin, Bruno Studer, définit le macronisme comme un « optimisme » ; Fabienne Keller, secrétaire générale de Renaissance, passée par LR, loue le côté « visionnaire » du président de la République, quand la députée Renew Salima Yenbou défend le « besoin d’Europe ». « Nous sommes des exigeants, nous sommes des combattants », a ajouté Clément Beaune. « L’extrême droite n’est pas intéressée par gagner des combats, a poursuivi l’ancien secrétaire d’État chargé des Affaires européennes, réactivant la stratégie de la confrontation avec le parti de Marine Le Pen. Ils sont intéressés par gagner des élections, ça leur fait un mandat. Ils sont intéressés par la démagogie, ça leur fait un fight. »
D’autres défendent le bilan du groupe pro-Macron Renew. « Chaque femme, chaque homme de la délégation est au travail, est crédible, pour changer l’Europe. Nous bâtissons l’Europe sociale, nous sommes les garants des valeurs européennes. Nous sommes le soutien à l’Ukraine », a énuméré, sous les applaudissements, Marie-Pierre Vedrenne, députée européenne Renaissance. « On peut être fier du plan de relance européen, de la transition écologique, de la taxe sur les géants du numérique », a abondé l’élu macroniste Pascal Canfin (ex-PS). Autant de sujets sur lesquels le président n’a fait que s’aligner sur le programme de la Fee européenne, délétère pour les jeunes.
Lola Ruscio