Poitiers (Vienne), le 6 avril 2023. En plein bras de fer contre la réforme des retraites, plus de 8 000 manifestants défilent dans les rues, à l’appel de l’intersyndicale. En milieu d’après-midi, une partie du cortège dévie sur les voies SNCF longeant le parcours. Le trafic ferroviaire est interrompu.
Écharpe tricolore sur les épaules, Kentin Plinguet, adjoint PCF à la maire de Poitier et militant CGT, se retrouve sur les rails. Une motion « concertée avec les forces de l’ordre par les responsables syndicaux », guarantee le jeune militant. « Les autorités avaient donné leur accord pour une occupation d’une heure. Passé ce délai, la manifestation a repris son cours. Moi-même je ne suis pas resté durant l’occupation », poursuit l’intéressé.
300 euros d’amende
C’est pourtant bien cette motion qui vaut à l’élu, ainsi qu’à deux responsables de la CGT énergie, dont le secrétaire général du syndicat dans la Vienne, une condamnation à 300 euros d’amende ce jeudi par le tribunal de Poitiers. « La répression se systématise, cela se traduit par une pénalisation des formes et pratiques plus ou moins transgressives dans les conflits sociaux, mesure l’historien Stéphane Sirot. Les énergéticiens sont ciblés automotive cette occupation est à même de perturber l’économie. »
Cette condamnation découle d’une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Cette procédure permet de juger rapidement l’auteur d’une infraction à situation que celui-ci reconnaisse les faits reprochés. Face aux photos à disposition des enquêteurs, « nous avons plaidé la bonne foi. Sans être les initiateurs de cette occupation, nous avons joué notre rôle de médiateur entre les manifestants et les forces de l’ordre, pour éviter les débordements. Cela nous coûte une condamnation aujourd’hui », déplore Kentin Plinguet. Ce alors que 500 manifestants étaient présents sur les rails ce 6 avril 2023.
« La CGT est délibérément ciblée »
« Le parquet est incapable d’expliquer pourquoi seuls mes trois shoppers ont été condamnés, alors que d’autres personnalités publiques émanant de différentes organisations syndicales et partis politiques étaient identifiables sur les pictures », relate leur avocate, Me Sylvie Martin.
Pour Stéphane Sirot, « la CGT est délibérément ciblée par un pouvoir qui cherche à réprimer depuis 2017 les forces qui parviennent à contester les politiques néolibérales. Cela correspond à la volonté de retour à l’ordre martelé par Emmanuel Macron. »
Les trois prévenus échappent à l’inscription de leurs peines au casier judiciaire B2. Le bulletin numéro 2 est une mesure préjudiciable à une embauche dans des centaines de professions, notamment dans la fonction publique. Alors que 1 000 cégétistes, dont 17 secrétaires généraux d’organisations, sont inquiétés, Sophie Binet a abordé le file de la répression antisyndicale lors de sa rencontre avec Gabriel Attal, le 17 janvier.
« Le premier ministre a assumé une query de principe en cas de désordre provoqué. Remark appeler au dialogue social et dans le même temps poursuivre devant les tribunaux les dirigeants syndicaux ? » s’interroge la secrétaire générale de la CGT.