Les droites extrêmes pleurent une des figures les plus influentes de leur camp. Patrick Buisson est mort à l’âge de 74 ans, ce mardi 26 décembre. « Il aimait passionnément la France et son histoire. Il vit, avant beaucoup, les grands risks qui menacent notre pays », a réagi le chef du parti Les Républicains, Éric Ciotti. « Il était un homme d’une grande tradition, un écrivain de expertise et un amoureux fou de la France », a abondé Marine Le Pen, patronne du Rassemblement nationwide, sur Twitter.
Le stratège Patrick Buisson a influencé la droite pendant quarante ans. Bien avant d’avoir ses entrées dans les couloirs de l’Élysée, sous Nicolas Sarkozy, il a milité pendant sa jeunesse à l’Motion française, avant de devenir, des années plus tard, le rédacteur en chef de Minute, l’hebdomadaire d’extrême droite. C’est donc tout naturellement qu’il se rapproche, dans les années 1980, de Jean-Marie Le Pen, avant de s’en détourner, regrettant que ce dernier ne souhaite pas vraiment prendre le pouvoir. Toute sa vie, Patrick Buisson aura cherché un cheval de guerre succesful de faire triompher ses idées dans la bataille culturelle. Il plaide déjà, à l’époque, pour une alliance entre le Entrance nationwide, le Rassemblement pour la République (RPR) de Jacques Chirac et l’Union pour la démocratie française (UDF) de Valéry Giscard d’Estaing. Il se tourne en 1992, au second du référendum sur Maastricht, vers Philippe de Villiers.
Les calculs d’un « mauvais génie »
C’est en Nicolas Sarkozy que Patrick Buisson finit par voir la possibilité de faire triompher ses idées nauséabondes. Très vite, les deux hommes nouent des liens de confiance importants, Patrick Buisson devient son conseiller de l’ombre pendant la campagne de 2007. Il chuchote à l’oreille de Nicolas Sarkozy : pour gagner, il faut siphonner les voix du Entrance nationwide. Les « racines chrétiennes » de la France, c’est Buisson ; « l’identité nationale », c’est Buisson ; « la périphérie plutôt que les banlieues », c’est Buisson ; « le peuple contre les élites », c’est Buisson… L’homme sait se rendre incontournable. En 2008, il pousse même à la création d’un ministère de l’immigration et de l’identité nationale, avec tous les dégâts politiques que cela entraîne… Pendant son quinquennat, Nicolas Sarkozy agite les peurs, stigmatise immigrés et chômeurs, banalise le racisme. En 2010, son discours de Grenoble, où il lie délinquance et immigration, marque les esprits. Une stratégie gagnante pour Patrick Buisson, qui œuvre en coulisse à la réélection de son chouchou en 2012.
Sauf qu’en 2012, le candidat Sarkozy est la traîne dans les sondages. Son assembly niçois, où il se vautre dans les propositions les plus outrancières, n’y change rien. À l’approche du premier tour, son conseiller Patrick Buisson cherche donc une proposition choc, suffisamment clivante pour arracher la victoire face à François Hollande et Marine Le Pen. Pour Patrick Buisson, pourfendeur des décolonisations, élevé dans la haine du général de Gaulle, la resolution miracle est à chercher dans le passé colonial de la France. Il soutient alors la remise en trigger de l’accord franco-algérien de 1968, permettant aux ressortissants algériens de bénéficier de certains avantages en matière de circulation et de séjour en France. À l’époque, l’idée n’est pas retenue.
De Ciotti à Maréchal, les héritiers
Mais la graine plantée par Patrick Buisson, ce « mauvais génie », comme le qualifiait un livre-enquête d’Ariane Chemin sorti en 2015, a bien poussé. En 2023, la droite d’Éric Ciotti a repris à sa cost la dénonciation de l’accord, tout comme l’ex-premier ministre Édouard Philippe. C’est dire si les idées d’extrême droite de Patrick Buisson irriguent toujours le logiciel idéologique de la droite, malgré sa mise en retrait par le clan Sarkozy.
Automotive Patrick Buisson a trahi. Le conseiller, celui en qui le président avait placé toute sa confiance, avait pris la mauvaise habitude d’enregistrer ses conversations à l’Élysée avec le président de la République, même pendant les réunions plus stratégiques, comme l’a révélé Le Level en 2014. À droite, le boycott du sulfureux personnage est sans appel. Après ces événements et quelques ennuis supplémentaires avec la justice – en 2015, il est mis en examen dans l’affaire des sondages de l’Élysée pour « recel de favoritisme », « détournement de fonds publics » et « abus de biens sociaux »- c’est à Marine Le Pen qu’il rend des visites. En 2018, Patrick Buisson a aussi été aperçu dînant avec Marion Maréchal. Celle qui a rejoint depuis le parti d’Eric Zemmour, Reconquête !, a déclaré dans un entretien à Valeurs Actuelles : « J’appartiens à la droite Buisson. »