Dans le catalogue d’annonces lancées le 5 décembre par le ministre de l’Éducation Gabriel Attal, ce n’est pas forcément celle qui a soulevé le plus d’consideration : MIA (pour « modules interactifs adaptatifs ») sera à la disposition de 200 000 élèves de seconde dès février 2024, et de toutes les secondes en septembre. Cette software est supposée fournir à chaque élève des exercices adaptés à ses besoins, en maths et en français. Elle officialise l’entrée de l’intelligence artificielle (IA) dans l’éducation nationale. Une arrivée qui soulève autant d’espoirs en de nouvelles options que d’inquiétudes quant aux implications sur le métier lui-même.
Entre panique et techno-béatitude, faire la half des choses devient pressing. C’est ce à quoi s’applique Christophe Cailleaux, professeur d’histoire-géographie en lycée et à l’université. Également coresponsable du groupe numérique du Snes-FSU, il a assuré, avec Cédric Biagini et François Jarrige, la coordination du livre de référence « Critiques de l’école numérique » (l’Échappée, 2019). Il est l’un de ceux qui portent l’exigence d’un recul critique sur les rapports entre éducation et applied sciences.
Peut-on parler d’une méfiance générale du monde enseignant vis-à-vis de l’IA ?
« Méfiance générale », non. Des critiques face à l’accélération du renouvellement des strategies existent. Elles ne sont d’ailleurs pas spécifiques au monde enseignant. Cela renvoie à la maîtrise de son métier : si on y parvient avec les outils actuels, pourquoi en ajouter d’autres ? Il y a également la conviction que le temps des apprentissages n’est pas le même que celui d’un monde technologique en accélération permanente.
On nous dit que l’IA permettra de soulager enseignants et élèves des tâches les plus répétitives…
C’est souvent présenté comme ça et en effet, certains peuvent y voir, à courtroom terme, une sorte de confort. Les IA génératives kind ChatGPT sont devenues très performantes : des collègues peuvent être tentés de les utiliser pour préparer un cours, des questions, corriger des copies, et se dire : « Ça existe, nos élèves les utilisent, donc on n’a pas le choix, autant leur apprendre à les utiliser intelligemment. »