Bérézina en Macronie. Le gouvernement et, singulièrement, son ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin ont essuyé un cinglant revers, lundi 11 décembre, à l’Assemblée nationale. La movement de rejet du projet de loi sur l’asile et l’immigration, déposée par les écologistes, a été votée avec 270 voix contre 265.
La majorité s’est heurtée aux députés de gauche des groupes Gauche démocratique et républicaine, France insoumise, écologiste et socialiste, qui dénoncent un projet de loi inhumain et tressant un amalgame entre étrangers et criminalité. Mais aussi aux voix du Rassemblement nationwide et d’une partie du groupe « Les Républicains », partisans, à l’inverse, d’un durcissement de ce dernier.
« La somme des soutiens de ce texte est inférieure à la somme des opposants dans cette Assemblée. C’est un petit texte porté par une petite majorité », avait prédit Benjamin Lucas, député Génération.s, alors qu’il présentait dans l’Hémicycle la movement de rejet. « Nous sommes potentiellement à la fin du “en même temps“. En réalité, il y a deux visions qui s’affrontent », espérait-il, quelques dizaines de minutes avant la séance. « Ce sont les limites de la politique du “et en même temps“ », a réagi à son tour Olivier Marleix, chef du groupe « Les Républicains », après le vote.
« Il faut que cesse cette fracturation du pays sur l’immigration »
Au sortir du vote, la rapporteuse pour le projet de loi du groupe Gauche démocratique et républicaine, la députée communiste Elsa Faucillon, a salué la victoire. « Il faut que cesse cette fracturation du pays sur l’immigration », a-t-elle souligné, inquiète du climat créé par cette proposition de loi dans le débat depuis plus d’un an. « Nous avons tout au lengthy des débats tenté d’imposer un autre récit sur l’immigration », avance la parlementaire qui, avant le vote, avait défendu pour son groupe le « refus de voir le Sénat et l’Assemblée nationale être la caisse de résonance de propos haineux, xénophobes et essentialisant à l’encontre des étrangers de ce pays ».
Des propos qui font écho aux paroles de la présidente du groupe écologiste Cyrielle Chatelain, qui dénonce un « racisme d’atmosphère » alimenté par une classe politique plus raciste que les Français. À l’situation du vote, elle demandait que le texte soit « définitivement retiré ». Une demande également partagée par Boris Vallaud, président du groupe socialiste.
Pour la France insoumise, Mathilde Panot, présidente du groupe, s’est dit satisfaite de voir le gouvernement « minoritaire à l’Assemblée nationale ». « Je crois que maintenant (Gérald Darmanin) doit partir », a-t-elle ajouté. Dans le débat parlementaire, son collègue Thomas Portes avait dénoncé un texte sous forme de diversion : « Un Français sur quatre a déjà renoncé à se soigner pour des raisons financières ; 3 000 enfants dorment chaque nuit à la rue. Et la planète brûle. Voilà les urgences qui devraient nous occuper. Au lieu de ça, vous faites le choix de viser l’étranger pour éviter de regarder en face le bilan de vos politiques antisociales. »
Après ce vote de rejet, le gouvernement est face à plusieurs choix : l’abandon du texte ; le retour au Sénat, ou le passage en fee mixte paritaire, où serait de toute façon examiné le texte issu du Sénat, dans sa model la plus dure. Au palais du Luxembourg, les parlementaires LR, majoritaires, avaient exclu toute régularisation, même partielle, de travailleurs sans papiers.
Ces « avancées » pour LR et le RN, « recul » pour les autres, avaient été abrogés par la fee des Lois de l’Assemblée dirigée par Sacha Houlié (Renaissance). Éric Ciotti, président des « Républicains », a ainsi déclaré après le rejet du texte que « les débats sur l’immigration doivent se poursuivre sur une base plus crédible que celle empruntée par la majorité qui a détricoté le texte durci du Sénat et empêché toute évolution constitutionnelle » en matière d’immigration. « Soit le gouvernement reprend le projet du Sénat, soit il l’abandonne et les Français voteront un jour pour une majorité qui limite l’immigration », s’enflamme le député d’extrême droite Nicolas Dupont-Aignan.
À jouer sur les deux tableaux, il s’est aliéné tout le monde
Ce vote est un camouflet pour le ministre de l’Intérieur, qui disait souhaiter contrer la démagogie de Marine Le Pen en matière d’immigration. Celui-ci a rencontré Emmanuel Macron, lundi soir, après ce désaveu parlementaire, pour lui présenter sa démission. Le président a fait savoir qu’il l’avait refusée.
Gérald Darmanin avait joué ces derniers mois sur les deux tableaux. Du côté droit, pour convaincre la droite d’un texte qui permettrait l’expulsion d’immigrés délinquants. Du côté gauche, en ouvrant la porte à une régularisation très partielle de travailleurs sans papiers. Il s’est aliéné tout le monde. Neuf membres de la majorité étaient en outre absents lors du vote, ce qui aurait pu le faire basculer.
Les tentatives du ministre, à l’Assemblée, d’accuser la gauche de complaisance avec l’extrême droite n’ont pas eu l’effet escompté : « J’ai bien vu vos clins d’œil pour le Rassemblement nationwide. Monsieur Lucas, j’ai bien vu votre compromission avec le parti de Mme Le Pen », persiflait-il en route des bancs écologistes. Des thousands and thousands de personnes vont voir les députés du RN et LR voter avec M. Lucas, qui veut la régularisation de tous les sans-papiers. Une partie de la droite va voter avec la Nupes, dont une partie est hors du champ républicain. »
Son discours avant le débat semblait tout porté vers un travail futur sur le texte avec son ancien parti, « Les Républicains ». Gérald Darmanin a ainsi appelé la droite à adresser des preuves d’« amour pour nos policiers et nos gendarmes » en permettant que soit votée cette loi dont le principal volet est d’expulser les migrants condamnés pour fait de délinquance. « Les moyens donnés aux préfets, aux forces de l’ordre, est un débat essentiel ! » a asséné le ministre. Ne pas voter le texte reviendrait à rien de moins qu’à « désarmer les policiers et gendarmes ».
Le locataire s’était aussi engagé à « répondre aux questions posées aux sénateurs dès début 2024 sur l’évaluation et la réforme de l’Aide médicale d’État ». Le Sénat à majorité LR avait voté une restriction drastique de cette dernière, mais cette diminution des droits des migrants a été abrogée par la fee des Lois de l’Assemblée. La query de l’immigration a rétabli le clivage gauche-droite, au risque de fissurer la majorité présidentielle, dont une partie n’a pas accepté les attaques les plus liberticides de la droite et souhaitait une régularisation, même très partielle, des travailleurs sans papiers. Le gouvernement subit là une défaite cuisante.