Le patronat, la CFDT et la CFTC sont finalement parvenus à un accord ce vendredi soir sur de nouvelles règles d’indemnisation des privés d’emploi à partir de 2024, après neuf séances de négociations. « On attendait des mesures concrètes et justes et on les a obtenues », s’est félicité Olivier Guivarch, le négociateur de la CFDT. « Nous avons utilisé toutes les voies de passage que nous avons pu élaborer », après cette négociation « difficile depuis le début », a-t-il poursuivi. Un « avis positif » qui devra encore être avalisé par le bureau nationwide de l’organisation le 16 novembre.
La CFE-CGC et la CGT ne signeront pas cet accord, y voyant par là un « nouvel accord régressif », selon le secrétaire confédéral de la CGT, Denis Gravouil. « Dès le début, nous avons dit que nous le signerions s’il n’y avait pas un euro de baisse des droits. Or, celle-ci est comprise entre 1 et 2 milliards, selon les calculs, selon si ceux-ci sont sur l’année ou sur quatre ans », explique le syndicaliste. L’accord avalise 815 thousands and thousands de dépenses supplémentaires et 1,5 milliard de recettes en moins du fait de la baisse des cotisations employeurs.
Certes, quelques améliorations, comme une « meilleure prise en compte des ayants droit d’un allocataire qui décède », que le syndicat réclamait depuis plus de dix ans, figurent dans le texte. Tout comme y est inscrite une très légère amélioration des droits des saisonniers, qui devront avoir travaillé au minimal cinq mois au lieu de six, ou encore une légère amélioration pour les primo-demandeurs d’emploi. Autant de droits supplémentaires « que les syndicats, ensemble, ont réussi à faire reculer sur plusieurs factors qui n’étaient pas négligeables », mais qui n’équilibrent pas la stability. Quand par exemple, dans l’accord, une mensualisation du nombre de jours indemnisés passe de 31 jours à 30 jours. Ce qui est « rédhibitoire ».
Pour son homologue de la CFE-CGC, c’est le maintien de la dégressivité des allocations pour les hauts revenus, qui lui a fait quitter le vendredi la desk des négociations. Seule Power ouvrière ne s’est pas encore prononcée, préférant attendre la tenue de son bureau confédéral, ce lundi, pour en débattre en interne et donner sa réponse dans les jours qui viennent, tout en notant que « les lignes rouges sont tombées », selon le négociateur Michel Beaugas.
Deux syndicats signent, et le gouvernement ?
Vendredi, les négociateurs des deux syndicats de travailleurs ayant annoncé leur signature de l’accord ont toutefois fait half de leurs inquiétudes. « On est prêt à le signer, maintenant faut-il encore qu’il soit agréé » par le gouvernement, a expliqué Éric Courpotin, à la CFTC. Le protocole d’accord est en effet transmis au gouvernement « qui décide de l’agréer ou pas. Ou de l’agréer partiellement. Mais c’est lui qui va devoir décider de ce qu’il prend dans l’accord », explique Denis Gravouil.
Dans la soirée du 10 novembre, le cupboard du ministre du Travail, Olivier Dussopt, a déclaré « prendre acte » de l’accord trouvé et « étudier » la compatibilité de l’accord élaboré par les partenaires sociaux avec les objectifs qu’il leur avait fixés en amont dans une lettre de cadrage. Pour rappel, le gouvernement a imposé un cadrage aux négociations si rigide et unilatéral (pas touche aux réformes de 2019 et 2023 qui réalisent 3 milliards d’euros d’économies sur le dos des chômeurs en année pleine) qu’il pourrait mettre le texte à la poubelle pour faire adopter ses propres situations. C’est ce que craint la CGT.
Ce que les futurs chômeurs gagneraient
Drastiquement diminuées par le gouvernement dans les précédentes conventions, les situations d’ouverture de droits sont un peu assouplies. Pour s’inscrire pour la première fois à l’assurance-chômage et obtenir une allocation, un demandeur d’emploi devra avoir travaillé au moins cinq mois, et non six, au cours des derniers 24 mois. Les syndicats revendiquaient quatre mois, comme avant le tour de vis. La durée d’indemnisation minimale est quant à elle fixée à cinq mois (contre six actuellement).
Les saisonniers voient aussi l’étau se desserrer un peu : ils devront aussi avoir travaillé cinq mois pour être indemnisés et leur durée d’indemnisation minimale sera également de cinq mois. L’actuelle règle des six mois prive pour l’heure bon nombre de ces travailleurs d’allocations entre deux contrats de travail ou saisons d’hiver et d’été.
Quant à la dégressivité de l’allocation chômage, qui concerne ceux qui perçoivent une indemnité journalière supérieure à 91,02 euros par jour (correspondant à un salaire brut avant perte d’emploi de 4 850 euros), elle ne sera plus appliquée à partir de 55 ans, contre 57 ans jusqu’ici. La CFE-CGC et les autres syndicats revendiquaient la suppression de cette dégressivité.
Ce que les futurs chômeurs perdraient
Même si la query du type des seniors privés d’emploi est repoussée à de futures négociations liées aux conséquences de la réforme des retraites (passage de l’âge légal de départ de 62 ans à 64 ans), l’accord prévoit bien des économies à réaliser : 440 thousands and thousands d’euros sur la période 2024-2027. « Les fins de carrière payées par l’assurance-chômage, c’est terminé », a claironné Éric Chevée, négociateur de la CPME.
Mesure d’apparence method, les nouvelles règles de versement des indemnisations chômage vont elles aussi permettre à l’Unédic de réaliser 950 thousands and thousands d’économies sur quatre ans, sur le dos des chômeurs, selon les calculs du patronat. L’allocation versée sera identique chaque mois, sur la base de 30 jours. Sur une année complète, les chômeurs perdront cinq jours d’indemnisation, et même six les années bissextiles. Mais ces jours économisés viendront rallonger d’autant de jours les droits de ceux qui arrivent à la fin de leur période d’indemnisation. « C’est une baisse de droits », synthétise pour la CGT Denis Gravouil.
Les demandeurs d’emploi qui créent ou reprennent une entreprise verront les dispositifs d’aide diminuer de 870 thousands and thousands sur quatre ans.
Quant aux intermittents, si le patronat abandonne son exigence de 15 % d’économie, il obtient le maintien des règles actuelles d’indemnisation. Ce faisant, il balaie les avancées obtenues par un accord sectoriel négocié entre fédération patronale et organisations syndicales le 27 octobre.
Ce que gagneraient les employeurs
En plus d’avoir lâché peu de choses aux futurs privés d’emploi, les organisations patronales engrangent deux avancées. Elles qui revendiquaient en milieu de négociation une baisse de leurs cotisations d’assurance-chômage de 4,05 % à 3,95 % ont accepté une diminution deux fois moins importante, de 0,05 %. Il en coûtera à l’assurance-chômage 1,5 milliard sur quatre ans.
Par ailleurs, le système de bonus-malus à l’encontre des secteurs abusant des contrats courts, déjà peu coercitif, est révisé à la baisse pour les employeurs. L’accord diminue le sort de fin de contrats soumis au bonus-malus et ne prend en compte que les fins de contrat d’une durée inférieure à un mois.
Alice Terrier et Stéphane Guérard