Sans grande shock, le Sénat a rejeté, par 246 voix contre 34, la proposition de loi portant sur « l’amnistie des faits commis à l’event de mouvements sociaux et d’activités syndicales et revendicatives. »
Le texte, déposé par les sénateurs communistes (CRCE-Ok), entendait, au travers son article 1, amnistier « les délits passibles de moins de dix ans d’emprisonnement et les contraventions », commis « à l’event de mouvements collectifs revendicatifs, associatifs ou syndicaux, relatifs aux problèmes liés à l’éducation, au logement, à la santé, à l’environnement et aux droits des migrants, y compris au cours de manifestations sur la voie publique ou dans des lieux publics. »
« 1 000 militants syndicaux sont aujourd’hui sous la menace de licenciement de sanctions disciplinaires de convocation ou de poursuites judiciaires », à la suite du mouvement contre la réforme des retraites, a rappelé en introduction des débats la sénatrice PCF Silvana Silvani.
Et la nouvelle élue de Meurthe-et-Moselle d’ajouter : « 67 % des syndiqués perçoivent leur engagement comme un risque professionnel, illustrant une négation de la légitimité de l’engagement syndical par une partie du patronat, qui met en place des stratégies antisyndicales afin de dissuader les salariés de s’organiser collectivement. »
Soutien des écologistes, abstention des socialistes
Pour l’élu centriste, Jean-Michel Arnaud « outre l’facet du fait du prince, la tolérance de la société et des citoyens face aux infractions restées impunis sont désormais faibles. » Le rapporteur de la fee des lois du sénat dénonce par ailleurs « le champ de l’amnistie prévue dans cette proposition de loi qui concerne la plupart des délits survenus à l’event de conflits du travail ou de mouvements collectifs revendicatifs associatifs ou syndicaux, mais aussi ceux qui ont pu se joindre à eux dans l’intention de commettre des délits. »
À gauche, la proposition de loi du groupe CRCE-Ok a reçu le soutien des élus écologistes. « Au lieu d’être entendu ou au minimal d’être respecté, les mouvements sociaux sont criminalisés, tance la sénatrice Mélanie Vogel. 600 travailleurs, selon la CGT, sont ciblés par des procédures disciplinaires suite aux mobilisations contre la réforme des retraites. De manière similaire les militants écologistes sont criminalisés parce qu’ils s’opposent à l’aberration écologique que constituent les méga bassines. » Le groupe socialiste s’est abstenu.
Les outrances du ministre Éric Dupond-Moretti
Cependant, les débats dans l’hémicycle ont été marqués par les outrances du ministre de la Justice. Éric Dupond-Moretti, a d’abord rappelé qu’ « à des amnisties événementielles se sont succédées des amnisties générales, une forme de solde de tout compte pratiquées systématiquement par la gauche mais aussi par la droite entre 1981 et 2002 à la suite des élections présidentielles. » Et d’ajouter « cette custom s’est éteinte il y a plus d’une vingtaine d’années. Il n’apparaît pas opportun de la ressusciter. »
Surtout le garde des sceaux guarantee qu’en « 2023 une telle loi d’amnistie ne ferait qu’aggraver la discorde et nourrir l’impunité, alors même que les voies de l’apaisement ont été trouvées et que le dialogue social a été renoué lors d’une grande conférence sociale. » Précisant au passage que « le gouvernement ne souhaite pas que l’on puisse offrir une impunité aux casseurs, aux pillards et aux vandales »
« Des syndicalistes se battent tous les jours pour l’amélioration des situations de travail et l’augmentation des salaires. Ils n’ont véritablement pas le sentiment que le dialogue social est rétabli », a rétorqué l’élu PCF de Paris, Ian Brossat. Et sénatrice Cathy Apourceau-Poly de dénoncer les « amalgames » du ministre entre « les faits commis à l’event de mobilisation syndicale et les violences urbaines », assurant que cette proposition de loi ne vise pas « à ne pas sanctionner les black block qui se sont par ailleurs déjà attaqués aux militants syndicaux durant les manifestations. »
Enfin, le ministre de la Justice a sombré dans l’outrance en assurant qu’en l’état, ce texte « permettrait d’amnistier des auteurs de cris tels que « mort aux juifs » lors de certaines manifestations », faisant ainsi un amalgame entre la répression antisyndicale et le conflit en cours entre Israël et le Hamas.
« Il est intolerable et inacceptable de sous-entendre, qu’avec cette proposition de loi, nous serions celles et ceux qui se permettraient de tenir des propos antisémites dans notre pays. Vous le savez, ceci n’est ni notre histoire ni nos valeurs », a fermement rétorqué la présidente du groupe CRCE-Ok, Cécile Cukierman.
Et Ian Brossat de conclure : « C’est vous, Monsieur le garde des Sceaux, à l’époque, qui vous étiez opposé la résolution des députés communistes visant à rendre inéligible les auteurs de propos et actes racistes ou antisémites »