Par Maryse Dumas, syndicaliste
Que Bernard Arnault, ex-PDG de LVMH et première fortune mondiale (en progrès de 73 % sur un an), annonce verser un chèque aux Restos du cœur en grande difficulté, et nous voici sommés de nous prosterner devant une telle prétendue générosité ! Tous les influenceurs politiques et médiatiques de la Macronie et de la droite sont au diapason : il faut aimer les riches et les admirer. Pas query de laisser passer la moindre réflexion critique sur l’origine de sa fortune, sur sa responsabilité dans le développement de la pauvreté, ni sur le bénéfice d’picture, donc financier qu’il escompte de son geste.
C’est à cet épisode que j’ai pensé en lisant le livre « Belief », écrit par Hernan Diaz et publié cet automne aux éditions de l’Olivier. Le mot « belief » a une racine anglo-américaine. Il apparaît à la fin du XIXe siècle et désigne d’abord un système d’union financière entre plusieurs entreprises destinées à avaler les entreprises concurrentes.
En France, il est souvent associé à la notion de monopole et à celle de drive de pression économique et politique. Le roman nous emmène dans les milieux financiers du début du XXe siècle aux États-Unis alors que s’annonce la crise des années trente, quand les pertes des uns font les positive factors immenses des autres et construisent leur puissance économique et politique. On nous montre les grandes fortunes et leurs détenteurs doués bien sûr de capacités personnelles impressionnantes : brillants, intelligents, ils sont présentés comme recherchant avant tout le bien commun.
L’argent, la possession, le pouvoir ne seraient pas leur premier cell, mais seulement la conséquence de leur volonté de soutenir des projets sociaux ou artistiques au service de leur nation. Mais voilà, le vernis craque. L’ampleur de la mystification se révèle. « Mon métier consiste à avoir raison. Toujours. S’il m’arrive de me tromper, je dois faire utilization de tous mes moyens et ressources pour tordre la réalité de manière à la faire coïncider avec mon erreur afin que celle-ci cesse d’être une erreur », explique le financier. Le livre est construit en quatre events.
La première présente la biographie d’un couple et sa réussite financière – il acquiert une immense fortune. La deuxième raconte la même histoire avec des noms différents, écrite par le financier lui-même, dans laquelle se dessine sa méthode de building de son picture. La narratrice de la troisième partie est une sténodactylo, fille d’imprimeur immigré pauvre et anarchiste, recrutée pour transcrire cette biographie élogieuse du financier. La dernière partie, enfin, est faite du journal intime de l’épouse du financier. Là, notre regard change à nouveau !
Contrairement à ce que l’on a cru, le vrai sujet du livre est sans doute moins la montée du capitalisme financier que la manière dont il se montre, dont il travaille son picture pour nous séduire et nous tromper. Le titre du livre prend alors une autre signification. Belief en anglais signifie aussi la confiance, voire la crédulité : celle du commun des mortels vis-à-vis des mécanismes du système capitaliste ; la nôtre aussi, conduite, tout au lengthy du livre, là où l’auteur le veut. La véritable histoire ne se dévoile que dans les toutes dernières pages. Elle démonte l’entrelacement des dominations, principalement mais pas seulement, la domination hommes-femmes. Et ce n’est pas le moindre intérêt de ce livre. Arrivé à la fin, on a envie de tout relire mais avec un regard bien dessillé cette fois.