En Islande, une quarantaine d’organisations ont appelé les femmes à faire la grève le 24 octobre, pour protester contre les inégalités, notamment l’écart salarial existant de 21 % avec les hommes. La première ministre, Katrin Jakobsdottir, a déclaré : « Je ne travaillerai pas ce jour-là et je m’attends à ce que toutes les femmes ici présentes fassent de même. »
Cet écart de rémunération n’a pas empêché l’Islande de se hisser à la première place dans le classement des pays en matière d’égalité des sexes, effectué par le Discussion board économique mondial, dans un rapport de juin 2023. Pour Freyja Steingrimsdottir, directrice de la communication de BSRB (l’une des fédérations de travailleurs organisatrices de la grève) : « Un paradis de l’égalité ne devrait pas avoir un écart salarial de 21 %. »
Rappelons que la France s’y classe seulement 40e et régresse fortement cette année, puisque nous étions 15es en 2022. Pire encore, nous sommes au 82e rang dans la catégorie spécifique de l’écart de revenus entre sexes. Rappelons que la différence de salaires, tout temps de travail et postes confondus, est évaluée par l’Insee à environ 28 %. Compte tenu des blocages systémiques discriminant les femmes dans leur évolution de carrière, il est necessary de s’intéresser à ce taux, et non à celui visant l’écart de paie à poste identique.
La baisse de la France dans le classement du Discussion board économique mondial n’a été que très peu relayée, ce qui est regrettable puisque, évidemment, elle contraste âprement avec les discours officiels de la classe politique. Toutefois, on peut facilement faire un lien entre cette chute et l’annonce par Élisabeth Borne, à l’difficulty de la conférence sociale du 16 octobre 2023, de la réforme à venir de l’index égapro.
Cet index, qui a été créé en 2018, est censé noter les entreprises en matière d’égalité professionnelle. Plusieurs syndicats, comme la CGT, avaient pointé que ce dispositif ne faisait que distribuer de bonnes notes à tous les employeurs. En trigger, ses modalités de calcul appliquant entre autres, systématiquement, un seuil de tolérance de 5 %. Autrement dit, pour une entreprise qui pratique 12 % d’écart, on retiendra 7 %. En 2022, la députée Albane Gaillot avait d’ailleurs déposé une proposition de loi pour réformer cet index, que j’avais coécrite avec elle. Sans grande shock, ce texte avait été enterré.
Il est temps que les grandes organisations représentatives des salariés en France suivent l’exemple de l’Islande et appellent collectivement à une grande grève nationale. Comme l’écrivait déjà Gisèle Halimi en 2005 : « Les syndicats ont une place… bien sûr ils revendiquent l’égalité des salaires, mais ils n’ont jamais décidé d’une motion radicale, jamais une grève par exemple sur le seul mot d’ordre : égalité professionnelle pour les femmes. »