En ce mardi 29 avril, la place du Panthéon se couvre peu à peu de blouses blanches. Médecins, jeunes internes, externes ou encore étudiants en médecine, tous ont répondu à l’appel d’un certain nombre de syndicats de médecins libéraux à manifester contre la proposition de loi Garot. Sifflets, slogans, percussions et bonne humeur accompagnaient la colère sourde d’un monde médical à bout de souffle.
Dans le viseur des jeunes médecins, blouses ouvertes ou stéthoscope autour des mains comme pour symboliser des menottes : la proposition de loi à l’initiative de Guillaume Garot (PS), soutenue par un groupe de députés transpartisan, qui prône la régulation de l’installation des médecins dans les zones sous-dotées. Une réponse jugée insuffisante face à un problème bien plus profond. « Forcer des médecins à s’installer quelque part ne résoudra pas le manque de moyens », affirme Selma, 22 ans, étudiante en 2e année de médecine.
« Ce ne sont pas les médecins qui laissent tomber les patients dans certaines régions mais le gouvernement qui a laissé tomber toutes ces régions », continuent d’une même voix Sihem, 28 ans, interne en médecine générale, et Clément, 24 ans, étudiant en 5e année. À leurs yeux, les délais pour obtenir un rendez-vous explosent partout, y compris dans les zones dites « bien dotées ».
« La France entière est un désert médical »
Les jeunes en formation alertent également sur leurs conditions de travail : semaines de 60 heures, parfois de 110, salaires de misère, stages mal encadrés… « Un interne en médecine se suicide tous les dix-huit jours tellement les conditions de travail sont dures. Et sans ces internes à deux doigts du burn-out, les hôpitaux ne tourneraient même pas », déplore Émilie, 22 ans, étudiante depuis cinq ans. « On est payé le même prix qu’un ticket de métro par heure, soit 2,75 euros. Donc quand on fait une garde de quatorze heures sans dormir, on est payé 48 euros. »
Un peu en retrait, certains praticiens plus âgés proposent des solutions qui laissent perplexes. « Il faudrait permettre aux médecins retraités de continuer à exercer sans être surtaxés par l’Urssaf », suggère Olivier, médecin généraliste depuis trente-huit ans. Et d’ajouter que des mesures d’incitations financières pourraient aider les jeunes médecins à s’installer ailleurs.
Un avis loin de faire l’unanimité : pour beaucoup, la réponse passe d’abord par la formation de nouveaux médecins et l’amélioration des conditions d’exercice. « Créer davantage de facultés partout en France et former plus rapidement la jeunesse, ce serait une vraie solution de fond. Les jeunes médecins n’auraient plus à ”sacrifier” leur installation : ils choisiraient naturellement les territoires où ils ont étudié, parce qu’ils y auraient déjà leurs repères », assurent Isis, 22 ans, étudiante de 2e année, et Cécile, médecin généraliste depuis trente ans.
Le développement de maisons de santé pluridisciplinaires pourrait renforcer l’attractivité des territoires, selon certains, en rompant avec l’isolement des praticiens et en assurant un meilleur suivi des patients. Malgré les divergences de générations, un point d’accord émerge : les politiques publiques manquent d’ambition structurelle. Le cortège s’est élancé vers le ministère de la Santé, déterminé à faire entendre ses revendications. Au-delà de la loi Garot, c’est l’ensemble du système de santé que les manifestants appellent à repenser.
Avant de partir, une dernière chose…
Contrairement à 90% des médias français aujourd’hui, l’Humanité ne dépend ni de grands groupes ni de milliardaires. Cela signifie que :
nous vous apportons des informations impartiales, sans compromis. Mais aussi que
nous n’avons pas les moyens financiers dont bénéficient les autres médias.
L’information indépendante et de qualité a un coût. Payez-le.Je veux en savoir plus