Joël Le Scouarnec, dit-on, est un homme ordinaire. Un M. Tout-le-Monde, comme furent avant lui qualifiés les 51 bourreaux de Gisèle Pelicot ; comme le sont, supposons-le, les personnels impliqués dans les violences à Notre-Dame de Bétharram. Mais les cas par cas mis bout à bout interpellent, tant cela éclaire crûment ce que beaucoup voudraient encore considérer comme de simples faits divers qui plongeraient, par le hasard d’une mauvaise rencontre ou le vase clos d’une famille dysfonctionnelle, les victimes et leurs proches dans la spirale du traumatisme.
Tant cela illustre, surtout, les déviances d’une masculinité toxique, cette toute-puissance que certains hommes exercent sur le corps des femmes et des enfants. Le patriarcat est un poison qui enferme les victimes dans le silence et la honte, renforce le sentiment d’impunité des agresseurs. D’autant plus s’ils sont socialement intégrés, « bons pères de famille », professeurs, médecins, prêtres ou pompiers, notables, donc insoupçonnables. Ordinaires.
De celle des femmes à celle des enfants victimes de violence, la libération de la parole est une avancée majeure. Elle doit être écoutée, accompagnée, comprise et prise en compte. Oui, la honte doit changer de camp. Mais, derrière le slogan, la tâche est immense, qui exige, avant tout, une action politique, policière et judiciaire déterminée, et nécessite une prise de conscience individuelle et collective de ce que ces affaires disent de notre société, malade de ses faux-semblants et de ses archaïsmes.
Quelques semaines seulement après la clôture de l’éprouvant procès des viols de Mazan, il va falloir reprendre son souffle avant de replonger. Replonger dans les affres d’un dossier sordide, où l’omerta l’a disputé aux défaillances du système judiciaire.
L’ampleur du procès qui s’ouvre ce lundi 24 février dépasse les frontières de l’Hexagone. En témoigne le nombre de médias étrangers accrédités. Un procès hors normes. Celui d’un chirurgien à la perversité machiavélique, accusé d’avoir agressé sexuellement ou violé, en trente ans, 299 de ses patients, sédatés, âgés de 11 ans en moyenne. Trois décennies d’impunité, malgré les alertes, les dénonciations, les condamnations antérieures. Oui, la justice passera. Et il faudra, à nouveau, en tirer les leçons.
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