C’est un débat qui ne cesse d’être repoussé et dont le cœur du sujet risque d’être encore abordé de biais. La possible instauration d’une aide active et légale à mourir pour certaines personnes en fin de vie devrait, selon le souhait du premier ministre François Bayrou, être abordée séparément de celle sur les soins palliatifs.
Le chef de file du MoDem a ainsi annoncé son souhait de scinder en deux le projet de loi sur la fin de vie face aux députés du groupe Ensemble pour la République (EPR), a fait savoir son entourage, mardi 21 janvier. Il n’y aurait donc plus un seul texte, mais une loi consacrée aux soins palliatifs et une autre dédiée à l’aide à mourir.
« Pas une urgence »
Il y a une semaine, François Bayrou avait simplement renvoyé la fin de vie au « pouvoir d’initiative » du Parlement. Il accède donc à une demande des adversaires de l’euthanasie et du suicide assisté, notamment à droite de l’échiquier politique. Plusieurs membres de son gouvernement ont notamment exprimé leurs fortes réticences sur l’aide à mourir.
À commencer par son ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau – dont les positions réactionnaires, conservatrices et équivalentes en de nombreux points à l’extrême droite ne sont plus à prouver -, qui s’est prononcé contre un retour – dans sa totalité – du texte à l’Assemblée nationale. « Dans une situation où il n’y a pas de budget pour la France », la fin de vie « n’est pas une urgence », estimait un autre ministre, en privé, il y a quelques semaines. De même, une partie du Sénat s’est positionnée en faveur d’une scission.
Si le choix de deux textes peut paraître pragmatique, il marque en réalité un énième recul pour un projet de loi qui fut pensé comme étant la « grande réforme sociétale » de la présidence d’Emmanuel Macron. Près de huit ans après son accession à l’Élysée, la fin de vie n’a toujours pas été frontalement abordée par le pouvoir politique. Le choix de François Bayrou apparaît alors comme un nouvel arrêt, mettant au jour des dissensions au sein du camp macroniste.
La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, s’est par exemple prononcée contre une scission. « J’attends que le gouvernement et le premier ministre réinscrivent ce texte dans son ensemble à l’Assemblée nationale », et ce, dès « aujourd’hui », a-t-elle lancé sur le plateau de « C à vous » (France 5), dans la soirée du mardi 21 janvier.
À gauche, des voix se sont élevées pour dénoncer le cadeau que faisait François Bayrou à la droite et à l’extrême droite. « Quel est donc l’objectif, céder aux religieux et opposants pour ne pas adopter enfin l’aide à mourir ? Continuons la bataille pour conquérir cette ultime liberté », s’est par exemple insurgée la députée du Nouveau Front populaire (NFP) Danielle Simonnet, sur son compte X. Même son de cloche pour l’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD) : « Séparer le texte, c’est céder aux représentants religieux et aux opposants à l’euthanasie, séparer pour finalement ne rien faire ? »
75,6 % des votants en faveur d’une ouverture
La fin de vie a d’abord fait l’objet d’une convention citoyenne, organisée entre décembre 2022 et avril 2023. Les 184 participants, tirés au sort par le Conseil économique, social et environnemental (Cese), avaient alors pointé deux problèmes au sein du système de santé français : « Le cadre actuel d’accompagnement de la fin de vie n’est pas adapté aux différentes situations rencontrées » et « l’accès à l’aide active à mourir doit être ouvert ».
Ces derniers, dont 75,6 % des votants se sont exprimés en faveur d’une ouverture, estimaient ainsi nécessaire « de mettre en place à la fois le suicide assisté et l’euthanasie, dans la mesure où le suicide assisté seul ou l’euthanasie seule ne répondent pas à l’ensemble des situations rencontrées ».
Les participants à la convention citoyenne sur la fin de vie ont aussi listé plusieurs pistes de « garde-fous » permettant, selon eux, d’encadrer la pratique : l’écoute de la demande, qui doit garantir que la volonté exprimée est libre et éclairée, un accompagnement médical et psychologique, une validation soumise à une procédure collégiale et pluridisciplinaire, une réalisation encadrée par le corps médical dans un lieu choisi par la personne et dans le respect de la clause de conscience des professionnels de santé, mais aussi la création d’une commission de suivi, pour s’assurer du respect de la procédure.
Le projet de loi sur la fin de vie – présenté début 2024 à l’Assemblée nationale – prévoyait, de son côté, le développement des soins palliatifs mais aussi de légaliser, à d’importantes conditions, une « aide active à mourir ». La dissolution de juin dernier a eu raison du projet de loi, mis au placard juste avant un premier vote solennel. « On demande qu’un débat parlementaire ait lieu et qu’il aille au bout », a lancé Claire Thoury, sociologue et présidente du comité de gouvernance de la Convention citoyenne sur la fin de vie, au micro de franceinfo, mercredi 22 janvier au matin. Le gouvernement ne semble néanmoins pas parti pour accéder à cette demande.
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