En février, la France accueillera le prochain sommet mondial de l’intelligence artificielle (IA). Le gouvernement doit aussi retranscrire dans le droit français le règlement européen sur le sujet. Mais à chacun de ces rendez-vous, manque toujours une grande absente : la question du travail sous IA.
Sous le patronage de l’Institut de recherches économiques et sociales (Ires), la CFDT, la CGT, la CFE-CGC et FO ont présenté mardi 7 janvier un manifeste avec leurs propositions pour faire de l’IA une vraie thématique de négociations sociales. « Le plus souvent, les directions ne négocient tout simplement pas l’implantation de ces technologies dans leur entreprise, arguant que c’est trop compliqué. Résultat : l’IA est citée dans moins d’un accord d’entreprise sur 1000, pointe Charles Parmentier, en charge à la CFDT des transformations du travail. Beaucoup de salariés ne savent même pas qu’ils travaillent avec. »
Pas un objet technologique comme les autres
Voilà dix-huit mois que les quatre organisations syndicales, accompagnées d’une cinquantaine d’intervenants (des chercheurs comme d’autres organisations syndicales et patronales) planchent sur le sujet. « Nous sommes tombés d’accord pour considérer que l’IA n’est pas un objet technologique comme les autres. Il s’agit de systèmes qui évoluent après leur déploiement, changent les conditions de travail dans la durée et le dialogue social doit s’adapter », explique Odile Chagny, l’économiste qui a chapeauté ce projet. Les représentants syndicaux appellent donc le patronat à négocier un accord-cadre interprofessionnel sur l’intelligence artificielle.
« Du point de vue de la sécurité de leurs données traitées par des IA, mais aussi économiquement, les organisations patronales auraient tout intérêt à arrêter de considérer ces outils sociotechniques comme de simples logiciels de bureautique », glisse Nicolas Blanc, délégué national CFE-CGC au numérique.
Car d’un côté, de plus en plus de salariés introduisent de l’IA de manière informelle dans l’entreprise, avec les risques de biais et d’erreurs que cela comporte. De l’autre, les entreprises optent trop souvent pour des solutions d’IA « sur étagère », toutes faites, comme Copilot de Microsoft qui carbure à ChatGPT, sans savoir vraiment ce qu’elles veulent en faire.
« Beaucoup de directions croient aussi à la pensée magique »
« On constate en effet que beaucoup de directions veulent implanter de l’IA, avant tout parce que tout le monde le fait, renchérit Matthieu Trubert, co-animateur du Collectif numérique UGICT-CGT. Beaucoup croient aussi à la pensée magique : d’un coup, cette technologie ferait gagner du temps, de la productivité. Mais pour l’instant, on ne le constate pas. » Et si c’était le cas, le syndicaliste plaide pour que ces gains bénéficient aux salariés, via une baisse du temps de travail, plutôt qu’aux actionnaires via des plans de licenciements pour augmenter les dividendes.
« Dans notre contexte économique, l’intelligence artificielle n’est pas développée pour être un outil d’émancipation. C’est pour cela qu’il ne faut pas réduire la négociation de ces outils à leur usage. Il faut intégrer les droits fondamentaux dès leur conception », souligne Éric Peres, secrétaire général de FO-Cadres. En exemple, il cite des salariés des secteurs de la banque et de l’assurance qui, depuis qu’ils travaillent avec de l’IA, ont vu leurs tâches s’intensifier et se sentent sous surveillance.
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