Un ministre des Transports ne devrait pas dire ça. Mercredi, alors que la SNCF annonçait que les perturbations identifiées sur une ligne à grande vitesse du Sud-Est, au soir du réveillon de Noël, étaient dues au suicide de Bruno Rejony, conducteur de TGV, Philippe Tabarot a déclaré sur CNews que l’incident « aurait pu être plus grave » si le salarié « avait souhaité faire dérailler son train ». Avant d’ajouter que le geste du travailleur serait « plutôt lié à des problèmes personnels et familiaux très importants qu’à des problèmes professionnels ».
Il n’en fallait pas plus pour que les critiques se déploient. « Il n’y a eu aucune once d’humanité » dans ces propos, a dénoncé, au micro de RTL, le député la France insoumise de l’Essonne Bérenger Cernon, ancien cheminot. De son côté, la CGT cheminots de Lyon a déploré dans un communiqué des propos « non fondés et honteux » du ministre « qui se complaît dans des explications douteuses ».
« Un ministre à côté de la plaque »
D’autant que la commission santé, sécurité et conditions de travail qui s’est tenue auparavant n’a pas livré d’éléments permettant de confirmer que le décès de Bruno Rejony, militant CGT de la région lyonnaise et adhérent au Parti communiste français, était bien dû à un suicide, selon le syndicat. « La SNCF et le ministre ont confirmé l’information dans la journée avant même que la commission ne donne ses premières informations. Cela a été fait dans la hâte. Attendons les premiers résultats des enquêtes et respectons la famille de Bruno », lâche Laurent Saint-Léger, secrétaire régional de la CGT cheminots de la région de Lyon.
Face au début de polémique, le ministre qui a appris sa nomination lundi à la télévision s’est empressé de changer de ton ce jeudi sur RTL. « Certains de mes propos ont été mal interprétés, a-t-il dit. Il y a eu des répercussions sur des centaines de personnes, mais c’est avant tout un drame humain », a-t-il concédé. Reste que, pour Laurent Saint-Léger, ces acrobaties en disent long sur les compétences de son nouveau patron.
« Il a évoqué un possible déraillement du train causé par le conducteur, mais il n’y connaît rien. Jamais cela n’aurait pu arriver en raison des systèmes de rattrapage de nos engins. Ce qui aurait pu provoquer un déraillement c’est le manque d’entretien des rails, or ce n’était pas le cas. Le ministre est à côté de la plaque », fulmine le cégétiste.
Et les dernières positions de Philippe Tabarot ne risquent pas d’améliorer sa cote de popularité auprès des organisations syndicales. Jusqu’alors sénateur LR, ce Cannois de 54 ans a été le rapporteur d’une proposition de loi visant à limiter le droit de grève des personnels des services publics des transports pendant certaines périodes comme les vacances scolaires ou les jours fériés.
C’est aussi le même qui, lorsqu’il était vice-président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur chargé des transports, avait plaidé, entre 2015 et 2021, en faveur d’une privatisation de la ligne TER entre Marseille et Nice, dont l’exploitation a été confiée en 2021 au groupe Transdev. Voilà comment démarrer un mandat en se mettant sur les bons rails de la Macronie.
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