Une proposition de loi en ce sens, sur ce sujet très clivant, sera discutée ce jeudi dans l’hémicycle de la chambre haute. Où la commission des lois a déjà, ce mercredi, le texte.
Vilipendée avec force mais légalement autorisée dans quelques territoires se déployant du Pays basque au pays d’Arles (selon un jugement de la cour d’appel de Toulouse), la corrida, et, plus généralement, tout ce qui relève de la tradition tauromachique espagnole avec mise à mort, est régulièrement attaquée en France. Voire dans d’autres pays de tradition taurine, mais cela reste un autre sujet.
Il y a deux ans, Aymeric Caron…
Voici deux ans, le jeudi 24 novembre 2022 exactement, un texte du député Aymeric Caron visant à l’interdiction de la corrida en France avait été mis au programme de l’Assemblée nationale, dans le cadre de la niche parlementaire du groupe La France insoumise dont il était membre. Le député LFI avait fini par retirer sa proposition de loi, tout en fustigeant « l’obstruction » dont elle avait fait l’objet.
Deux ans plus tard, donc, c’est du Sénat que vient un nouvel assaut. En effet, un texte porté cette fois par la sénatrice centriste Samantha Cazebonne, cosigné par une quarantaine d’élus issus de plusieurs groupes, ambitionne d’interdire “la corrida et les combats de coqs en présence de mineurs de moins de seize ans”. L’objectif :”Préserver les mineurs de l’exposition à la violence”.
Premier signal favorable pour les aficionados
Cette proposition de loi sera discutée ce jeudi 14 novembre, en fin d’après-midi. Sans qu’il ne s’agisse d’une réelle surprise, les sénateurs de la commission des lois ont dans une large majorité repoussé une première fois cette proposition de loi ce mercredi 6 novembre.
Un premier signal favorable pour les aficionados et les parlementaires opposés au texte. Mais qui ne voulaient pas faire preuve d’un optimisme démesuré, à l’image de Laurent Burgoa, sénateur Les Républicains du Gard : “C’est plutôt bien parti, mais restons modeste et continuons à travailler à convaincre nos collègues. Et sur le fond, bien sûr que c’est aux parents de décider ! Et il est scandaleux d’introduire une notion de délits !”
Une tribune signée par environ 120 élus favorables au texte
A contrario, ce week-end, environ 120 élus ont signé et publié une tribune afin de soutenir cette proposition de loi. “Permettre à un enfant d’assister à une corrida, c’est l’initier à la pratique d’un délit” assurent notamment, parmi ceux qui ont paraphé ce texte, Sylvain Carrière, ou Nothalie Oziol, tous deux députés de l’Hérault.
Alors que la présidente de l’Alliance anticorrida, la Nîmoise Claire Starozinski, confiait, elle, ce mardi à Midi Libre, ne pas s’avérer particulièrement confiante sur l’issue de la discussion dans l’hémicycle ce 14 novembre : “On ne peut pas l’être au vu de la composition du Sénat. J’ai été la seule ONG auditionnée par la commission des lois et je suis atterrée quand je vois qu’elle a rejeté ce texte sans avoir à son tour proposé un seul amendement après avoir recueilli mon avis.”
Ce qui a motivé, mercredi, le rejet de la commission
Pour motiver le rejet largement majoritaire dont la proposition de loi visant à interdire la corrida aux moins de 16 ans a fait l’objet ce 6 novembre, le rapporteur Louis Vogel (Horizons) a entre autres évoqué des “sanctions pénales disproportionnées”, car elles pourraient atteindre cinq ans d’emprisonnement et 75 000 € d’amendes. “Je suis moi-même favorable pour les abaisser, nous ne sommes pas des fous !” convenait d’ailleurs la Nîmoise Claire Starozinski, présidente de l’Alliance anticorrida.
Qui concédait aussi, sur l’âge, qu’une “interdiction aux moins de14 ans pourrait être un seuil acceptable” acceptait-elle également de concéder.
Par contre, alors que le sénateur Vogel justifiait aussi, auprès de l’AFP, le rejet du texte en commission en estimant qu’”il ne faut intervenir dans le cercle familial que d’une main tremblante”, Claire Starozinski s’insurge : “Mais d’autres interdictions sont décrétées. Pour l’interdiction des films aux moins de 12 ou 16 ans, là, la main ne tremble pas.”
André Viard, de son côté, en sa qualité de président de l’Observatoire des cultures taurines, appréciait a contrario que “la commission a reconnu que ce texte était une attaque qui allait pénaliser les organisateurs comme les acteurs et les parents, qu’il s’agit d’une attaque aux droits de la famille, et d’une atteinte aux droits des collectivités.”
Verdict jeudi soir
Les sénateurs trancheront donc ce 14 novembre ce sujet en séance publique. Si la proposition de loi est acceptée, elle partira à l’Assemblée nationale, où un groupe politique la reprendrait probablement à son compte, dans les rangs de la gauche très certainement.
Mais, ainsi que l’ont laissé entendre nos interlocuteurs, tant chez les partisans de ce texte que dans les rangs de ses opposants, l’actuel rapport de force dans la chambre haute, dominé par la droite et les centristes, indique pour l’instant un pronostic favorable à un rejet final de la proposition de loi.
Verdict attendu entre 18 h et 20 h jeudi.
Le sénateur de l’Hérault Jean-Pierre Grand sera orateur pour son groupe (Les Indépendants, République et territoires) ce jeudi. Il a déposé deux amendements de suppression des deux principaux articles du texte qui sera discuté.