Depuis la crise du Covid, plusieurs mesures de surveillance instaurées il y a cinq ans ont laissé des traces durables dans les politiques de contrôle et de suivi des populations. Les applications de traçage (Stop Covid en France ou Corona-Warn-App en Allemagne) ont démontré la capacité des gouvernements à suivre les interactions sociales. Même si ces applications ont été abandonnées, elles ont marqué un précédent et soulèvent des questions non résolues sur l’utilisation des données personnelles. L’extension des QR codes et des certificats numériques a renforcé l’acceptabilité sociale des contrôles d’identité fréquents, y compris par des personnes non assermentées (restaurateurs, cafetiers, gérants de salle de spectacle…).
Des tensions exacerbées
Présentés comme inéluctables en mars 2020 par un président exhortant les citoyens à la « guerre » contre le Covid – un vocable guerrier qui n’a eu de cesse d’être repris ad nauseam par Emmanuel Macron –, les confinements stricts, couvre-feu et autres attestations de déplacement n’étaient pourtant pas le seul moyen de faire face.
C’est ce que pointent l’historien Nicolas Mariot et le sociologue Théo Boulakia dans leur ouvrage l’Attestation, une expérience de surveillance de masse (Anamosa, 2023) : « En Belgique, aux Pays-Bas, en Finlande ou en Norvège, comme dans d’autres États, les rassemblements étaient prohibés, mais pas les sorties. »
En France, en l’espace de 55 jours lors de la mise en place des attestations de sortie, 28 % de la population a été contrôlée au moins une fois. Amnesty International et la LDH ont dénoncé « des violences policières dans l’application du confinement, notamment contre des populations précaires et racisées », à quoi s’ajoutait « une forme de harcèlement des habitants de logements suroccupés qui cumulaient les amendes de 135 euros dès qu’ils mettaient un pied dehors. »
La période du Covid a ainsi exacerbé des tensions entre police et population, déjà fortes depuis les gilets jaunes et qui n’ont pas vraiment décru ensuite, comme l’illustrent les révoltes urbaines qui ont suivi le meurtre de Nahel à Nanterre (Hauts-de-Seine) et la forte répression des manifestations contre la réforme des retraites.
La pandémie a également accéléré l’installation de caméras dotées d’IA, notamment pour mesurer la distanciation sociale ou détecter le port du masque. Ces infrastructures existent toujours et les caméras algorithmiques installées à Paris pour les JO ont vu leur utilisation prolongée dans la capitale. Enfin, certaines lois adoptées en urgence sont restées en place, avec un flou juridique sur leur durée réelle. Au risque de voir s’effondrer l’État de droit si elles se retrouvaient demain dans d’encore plus mauvaises mains qu’aujourd’hui.
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