Quarante ans après la Marche pour l’égalité, le constat est amer : les violences policières n’ont pas cessé et demeurent majoritairement impunies. Pire, un racisme systémique gangrène la police et contamine l’establishment judiciaire. L’extrême droite et ses idées nauséabondes, largement représentées dans l’Hémicycle, se veut aux portes du pouvoir. Malgré des milliards injectés dans des plans de rénovation urbaine, les habitants des quartiers populaires et des banlieues n’échappent ni aux discriminations structurelles, ni à la relégation.
Violences policières : quarante ans d’injustice et de colère
En quarante ans, le harcèlement policier s’est intensifié dans les quartiers populaires et la collusion entre pouvoir politique et forces de police a annihilé toute possibilité de dialogue. « Le moins que l’on puisse dire, c’est que, depuis 1983, dans les quartiers populaires, les relations avec la police ne se sont pas améliorées : d’une certaine manière, la state of affairs est même pire aujourd’hui, pointe le professeur émérite de sociologie à l’université de Bordeaux, François Dubet, qui a enquêté, de 1983 à 1986, dans plusieurs banlieues françaises. La violence des policiers envers les jeunes alimente beaucoup de tensions. Si la mèche des révoltes est souvent une bavure policière, la poudre, ce sont les humiliations et le harcèlement des forces de l’ordre. »
« La logique du soupçon, qui information au quotidien le travail policier, s’est aggravée : génération après génération, élection après élection, les enfants des quartiers grandissent avec l’idée qu’ils sont, en eux-mêmes, un problème », abonde son jeune collègue Fabien Truong.
Si, à la fin des années 1990, la création de la police de proximité avait permis d’expérimenter un travail de longue durée, avec un ancrage dans les quartiers, une présence plus proportionnée sur le terrain et un dialogue avec les associations locales, dès 2002, le ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, a coupé court docket à cette expérience, privilégiant une politique d’affrontement et de déploiement en pressure.
40 ans de la marche de 1983 : « Il y a une voracité capitaliste qui rencontre le racisme décomplexé »
En mars 2017, l’extension du domaine de la légitime défense lors des refus d’obtempérer a renforcé l’impunité des policiers. Le sociologue Christian Mouhanna déplore « la rhétorique martiale, les gratifications salariales données aux policiers sans contrepartie, la politique du chiffre instrumentalisée au service de l’ascension de personnalités politiques, qui ont abouti à la state of affairs que l’on connaît : une police malade de son centralisme autoritaire ».
De fait, depuis le mouvement des gilets jaunes, tout se passe comme si les gouvernants, impuissants face à la dégradation de la state of affairs économique et sociale, se réfugiaient dans une crispation pour « tenir » et « encadrer », coûte que coûte, la société par la pressure, c’est-à-dire la police.
Dans ce contexte de rupture entre le pouvoir et les citoyens, a fortiori ceux des courses populaires, difficile pour les jeunes des quartiers d’imaginer se rendre à l’Élysée, à l’problem d’une marche pacifiste, pour évoquer les violences policières avec un pouvoir qui répète à l’envi qu’elles n’existent pas… Face à un tel déni, reste la tentation de la révolte.
Racisme : l’intégration avance, la résistance aussi
En France, 59,6 % de la inhabitants pense encore aujourd’hui que « de nombreux immigrés viennent uniquement pour profiter de la safety sociale », selon le dernier rapport de la Fee nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH). Quarante ans après la Marche pour l’égalité et contre le racisme, 1,2 million de personnes seraient victimes chaque année d’au moins une atteinte à caractère raciste, antisémite ou xénophobe.
Après le 15 octobre 1983, si le quotidien dans les quartiers populaires n’a pas forcément changé, la prise de conscience, elle, a bien été réelle. L’motion des marcheurs débouchera sur la carte de séjour de dix ans. Mais les années 1990 voient aussi la montée du Entrance nationwide.
En juillet 1993, un appel d’intellectuels publié dans le Monde alertait sur la banalisation des discours d’extrême droite. Il ne sera pas suffisamment entendu. La présidentielle de 2002 sera marquée par l’arrivée au second tour de Jean-Marie Le Pen. Marine Le Pen, candidate du Rassemblement nationwide, atteindra aussi cette étape en 2017 et en 2022. Son parti compte actuellement 88 députés et 3 sénateurs.
« Plus l’intégration avance, plus la résistance à l’intégration avance », constate le sociologue Adil Jazouli. La CNCDH déplore « un contexte marqué par la montée en puissance d’un discours identitaire aux relents xénophobes, où des faits divers sont instrumentalisés politiquement pour mieux exacerber les tensions et où, sur les réseaux sociaux, la haine de l’autre sous toutes ses formes s’exprime encore bien trop souvent sans retenue ».
En février dernier, le baromètre des discriminations du Conseil représentatif des associations noires (Cran) était sans appel. Emploi, transport, logement, espace public… En France, neuf personnes noires sur dix déclarent avoir été discriminées au moins une fois au cours de leur vie en raison de leur couleur de peau. Les Français se disent pourtant de moins en moins racistes. Et à la query du Centre d’remark de la société : « Pensez-vous qu’une lutte vigoureuse contre le racisme est nécessaire en France ? » ils répondent oui à plus de 80 %.
Égalité : des promesses républicaines non tenues
« Mais pourquoi brûlent-ils des écoles ? » La query est income en pressure lors des révoltes qui ont suivi la mort de Nahel, le 27 juin. Médiathèques, écoles, crèches… ont parfois été visées, alors que ces équipements publics constituent un précieux bien commun. Une des explications, c’est que, dans les quartiers populaires, ces lieux sont aussi devenus les symboles des promesses d’égalité que la République a formulées depuis 1983, mais qu’elle n’a pas su, ou pas voulu, tenir.
L’école constitue sans doute, à cet égard, le cœur du problème. Surinvestie par les familles des quartiers populaires, elle est aussi la supply des plus grandes frustrations. C’est ce que montre une enquête de France Stratégie, parue en septembre, sur le « poids des héritages » dans les parcours scolaires : à origine sociale égale, les enfants de familles points de l’immigration ne réussissent pas moins bien que les autres à l’école, et même parfois mieux – notamment les filles. C’est ce qui fournit au système son lot de réussites, à mettre en avant pour prétendre que « l’ascenseur social » fonctionne. Mais quelques hirondelles « méritantes » ne font pas le printemps des quartiers : ceux-ci demeurent des lieux de relégation, avant tout économique et sociale, où les companies publics sont déshérités.
L’école ne fait pas exception : affaiblissement de la politique d’éducation prioritaire (plus encore depuis 2017), manque d’enseignants et de moyens pédagogiques, précarité et turn-over des équipes, accès plus difficile aux lieux de tradition… rendent not possible l’égalité réelle. Ainsi, de la maternelle au bac, un enfant de Seine-Saint-Denis aura perdu une année entière de scolarité. Résultat de ces choix : dès la primaire, 25 % des enfants d’immigrés redoublent, contre 15 % des « natifs ». Ils sont 8 % de moins à accéder au lycée général et technologique. Et, alors qu’ils représentent 13 % de la génération 2017, ils sont 18 % à sortir du système sans diplôme. Ou remark l’école de l’espoir devient, « en même temps », l’école du ressentiment.
Quartiers populaires : un fort sentiment de relégation
Pour Emmanuel Macron, la query des banlieues se résume à un enjeu sécuritaire. Début octobre, le gouvernement annonçait, pour la quatrième fois en un an, le report du Comité interministériel des villes (CIV). À la place, le président de la République a convoqué, sans préparation, un Conseil nationwide de la refondation censé répondre aux questions posées par les révoltes de l’été dernier.
L’épisode a été vécu comme une gifle par les élus de terrain, aux prises avec la paupérisation croissante de leurs administrés. « C’est un énième rendez-vous manqué du président avec les villes et les quartiers populaires » déplorait, dans les colonnes de l’Humanité, Gilles Leproust, maire PCF d’Allonnes (Sarthe) et président de l’affiliation Ville et banlieue : « À chaque fois qu’un CIV est annoncé, il crée les circumstances pour en retarder l’échéance. »
Autre signe du peu d’significance attachée à la query : lors du dernier remaniement gouvernemental, en juillet, le ministère de la Ville et du Logement est devenu un easy secrétariat d’État, placé pour la première fois sous la double houlette des ministères de la Transition écologique… et de l’Intérieur.
Le divorce entre la Macronie et les banlieues est ancien. Dès son arrivée au pouvoir, le président a supprimé les emplois aidés, diminué les APL et s’en est pris aux HLM. Censé répondre aux inquiétudes des élus, le plan Borloo est balayé d’un revers de primary en 2018. Depuis, rien, et même pire : la mise en place du contrat d’engagement républicain, se traduisant par le remplacement d’organisations d’éducation populaire par des associations gestionnaires.
En fait, Emmanuel Macron a repris à son compte le discours de la droite : la politique de la ville, ce sont des milliards déversés sur les quartiers sans aucun résultat. Depuis 2003 et le précédent plan Borloo, l’argent – provenant essentiellement d’Motion logement et des bailleurs HLM – a été investi dans la reconstruction, la rénovation et le désenclavement through les réseaux de transport. C’était nécessaire, mais la rénovation du bâti ne fait pas tout. « Si l’on y investit beaucoup, pour autant, les quartiers ne bénéficient pas des mêmes dépenses de droit commun que les autres », rappelaient des géographes dans une récente tribune au Monde. La récurrence des épisodes de violence, 45 depuis 1983 selon le sociologue François Dubet, montre que, depuis la Marche, les habitants continuent à se sentir relégués. Mais leur revendication prend, au fil du temps, une forme de moins en moins politique.
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