Nouveau coup de rabot sur le pouvoir d’achat. Après quelques mois de répit, des millions de particuliers verront au 1er juillet leur facture de gaz s’alourdir de 11,7 % en moyenne, comme l’a annoncé la Commission de régulation de l’énergie (CRE), ce lundi 10 juin.
La facture annuelle TTC s’établirait ainsi à 1 184 euros par an, contre 1 060 euros annuellement jusqu’en juin. Le tarif « reste (toutefois) inférieur de 4,7 euros/MWh TTC au PRVG (prix repère de vente de gaz) moyen du 1er janvier 2024 », soit 3,5 % de moins, relativise le gendarme de l’énergie dans son communiqué.
Celui-ci tablait plutôt en février sur une hausse de 5,5 % à 10,4 % pour le mois de juillet. S’il en est autrement, « c’est notamment à cause de la majoration des tarifs d’acheminement », soutient le directeur du Centre de recherche en économie et droit de l’énergie (Creden), Jacques Percebois.
Tous les quatre ans, l’organisme régulateur fixe le tarif d’accès des tiers au réseau public de distribution de gaz de GRDF. Au 1er juillet, ce nouveau tarif dit « ATRD 7 » sera revalorisé de 27,5 %, comme le prévoit le projet de 2024-2027.
Un manque à gagner de 740 millions
La CRE explique notamment cet arbitrage par un effet rattrapage des événements conjoncturels des dernières années. À savoir : le renchérissement des coûts liés à la crise sanitaire et une succession d’aléas climatiques. Selon un rapport de l’outil de diagnostic énergétique de GRDF, datant du mois de décembre 2023, « le manque à gagner cumulé sur la période ATRD 6 (2020-2024) s’élevait à 740 millions d’euros ».
Pour déterminer ce tarif, la CRE a également pris en compte les hausses de coûts unitaires significatives, liées à une consommation en baisse de 20 % sur la période 2021-2023. « En effet, les usagers ont eu tendance à se détourner du combustible après que son prix a atteint des niveaux stratosphériques lorsque la Russie, alors premier exportateur des Vingt-Sept (40 % du gaz importé en 2021 était russe contre 8 % fin 2023), leur a coupé le robinet après avoir envahi l’Ukraine », reprend Jacques Percebois.
La consommation en baisse
Si la consommation a chuté, les réseaux, eux, sont toujours là et doivent compenser les coûts d’entretien tout en y intégrant progressivement le biogaz. « Raccorder les méthaniseurs au réseau pour atteindre un objectif de 20 % du gaz utilisé en France en 2030, et 100 % en 2050, pèse aussi lourd sur la facture des Français », souligne l’économiste. Mais, pour le secrétaire du CSE central de GRDF, Thomas Dutel, « le verdissement du gaz est essentiel pour notre indépendance énergétique ».
Autre facteur de cette envolée du tarif repère, selon le régulateur : « La hausse, constatée ces dernières semaines, des prix de gaz naturel sur les marchés de gros, qui compte pour 37 % de l’évolution. » Les problèmes techniques entraînant des ruptures ou des réductions d’approvisionnement ont pour conséquence une forte volatilité des cours. Début juin, la fermeture d’un gazoduc reliant la Norvège, devenue le principal fournisseur de gaz naturel européen dans le sillage de la guerre en Ukraine, et le Royaume-Uni, a fait bondir le prix du mégawattheure de plus de 13 %, touchant ainsi son plus haut niveau de l’année.
Pour autant, le cours du gaz sur le marché de gros est 26 % inférieur au pic de 2023, provoquant une « incompréhension pour l’usager, qui doit, lui, s’acquitter d’une facture plus salée », note Thomas Dutel.
Le prix du gaz n’est pas près de baisser
Pour lui, cette hausse aurait pu être contenue sans la suppression du tarif réglementé du gaz, fixée par les pouvoirs publics, le 1er juillet 2023. Cette mesure a donc eu pour conséquence de faire basculer des millions de Français sur une offre de marché.
« En juillet dernier, toujours, le gouvernement a également décidé de mettre fin au bouclier tarifaire, déployé par Jean Castex fin 2021, pour modérer l’impact sur les usagers de la flambée des prix du gaz », rappelle Frédéric Ben, responsable du secteur gaz à la Fédération nationale des mines et de l’énergie CGT. Le 14 septembre, Bruno Le Maire avait pourtant indiqué que la hausse des taxes serait « sans impact sur le consommateur ».
De son côté, la FNME-CGT considère que, pour un « prix juste pour tous », il serait nécessaire de restaurer la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN) au niveau de 2023, et de réduire la TVA sur l’ensemble de la facture de gaz à 5,5 %. Pour Jacques Percebois, « inutile de se faire des illusions, le prix du gaz n’est pas près de baisser ces prochaines années ».
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