En enchaînant les data en cette fin d’année, le CAC 40 fête le retour du risque. Après une hausse historique des taux d’intérêt pour enrayer l’envolée de l’inflation, les views sont désormais à la baisse pour 2024. De quoi enflammer les marchés financiers.
En un an, les actions des quarante plus grosses cotations boursières ont grimpé de plus de 17 %. Idem à Wall Road, aux États-Unis, avec un acquire de près de 13 %. En France, l’indice phare s’est hissé pour la première fois, le 14 décembre dernier, au-dessus des 7 600 factors, après avoir franchi les 7 500 factors en avril. « Depuis fin octobre, nous assistons à un rebond exceptionnel qui a permis de franchir ce nouveau palier. Dans les salles de marché, c’est un peu l’euphorie », explique un contrôleur de gestion d’actifs qui souhaite rester anonyme. Et certains font le vœu de voir le CAC 40 passer le seuil des 8 000 factors. Même si, en ce début d’année, les bourses mondiales ont marqué une pause.
Une étincelle pour que les marchés financiers s’illuminent
Pour ce spécialiste des locations financières, un sure nombre de facteurs ont permis le retour de la confiance sur les marchés actions. À commencer par le ralentissement de l’inflation. Même si elle reste élevée, la tendance de fond semble s’installer, explique-t-il. Les dernières prévisions de la Banque centrale européenne font état d’une hausse des prix de 2,7 % en 2024, 2,1 % en 2025 et 1,9 % en 2026 dans la zone euro.
Idem de l’autre côté de l’Atlantique, où l’inflation s’est élevée au mois de novembre à 3,1 % sur un an glissant. À cela s’ajoutent les nombreux pays qui ont évité, parfois de justesse, la récession (une croissance négative) cette année. La consommation des ménages, bien qu’affaiblie, a plutôt bien résisté, poursuit-il. Le chômage n’a pas explosé. Probablement parce qu’aucun secteur n’a connu de véritable retournement, même si ceux de l’immobilier et des banques ont été fragilisés.
Il ne manquait plus qu’une étincelle pour que les marchés financiers s’illuminent à nouveau. La spéculation autour d’une baisse des taux d’intérêt a joué ce rôle. Une probabilité qu’ont plus ou moins confirmé les grands argentiers. Le président de la FED, Jerome Powell, a confirmé avoir « discuté d’un calendrier de baisse des taux » pour 2024. Il est même allé jusqu’à déclarer qu’« il fallait être vigilant pour éviter l’erreur de maintenir les taux trop élevés pendant trop longtemps ».
Plus prudente, la Banque centrale européenne (BCE) a appelé « à ne pas baisser la garde ». Des risques inflationnistes demeurent, liés à l’évolution des salaires, à l’instabilité géopolitique engendrée par la guerre en Ukraine et au Proche-Orient ainsi qu’aux « événements météorologiques extrêmes » qui peuvent tirer vers le haut les prix des denrées alimentaires, a listé sa présidente, Christine Lagarde. Autrement dit, il faudra attendre au moins jusqu’au printemps avant de voir la BCE réévaluer ses views en matière de politique monétaire. « Les fonds d’actifs s’attendent à une baisse des taux de 1 à 1,2 », affirme le salarié d’un fonds d’investissement.
Les géants de l’indice parisien ont versé près de 100 milliards d’euros de dividendes
Ainsi, lorsque les taux d’intérêt baissent, les rendements des investissements à revenu fixe, tels que les obligations, diminuent. Cela rend mécaniquement ceux des actions plus attractifs. Les boursicoteurs sont donc plus enclins à allouer leurs fonds vers ces actifs plus risqués. « Entre le retour de la confiance, les taux toujours élevés, il y a un combine intéressant. Ainsi, le money récolté sur le marché obligataire permet d’acheter sur celui des actions », indique le contrôleur de gestion d’actifs. Résultats : les cours s’envolent. Et l’argent ruisselle. Selon les données récoltées par la Lettre Vernimmen, les géants de l’indice parisien ont versé près de 100 milliards d’euros de dividendes. Un report historique. Soit une hausse de plus de 20 % par rapport aux montants reversés en 2022.
Avec 100 milliards d’euros versés en 2023 (97,2 milliards d’euros exactement), dont 30,1 milliards d’euros sous forme de rachats d’actions, et 67,1 milliards d’euros sous forme de dividendes, les entreprises du CAC 40 ont battu tous les data de rémunération à leurs actionnaires, ont calculé Pascal Quiry et Yann Le Fur dans Vernimmen.internet de janvier. Après une récolte de 36 milliards d’euros en 2020, du fait du Covid, et des appels à la modération, les entreprises cotées ne cessent de choyer leurs actionnaires. Si elles ont doublé en 2021, avec 69,4 milliards, les rémunérations ont dépassé les 80,2 milliards d’euros en 2022. Soit une multiplication par trois, en trois ans. « La parenthèse pandémique est bel et bien refermée », précisent cependant les auteurs de la be aware.
L’optimisme que peut susciter l’inscription d’un nouveau report historique pour le CAC 40 sur les marchés financiers n’a pas gagné l’économie réelle. La croissance devrait continuer à être poussive en début d’année, selon la be aware de conjoncture de l’Insee publiée en décembre.
Dans ces situations, la France aura des difficultés à franchir les 1 % de hausse de son PIB. Face à la faiblesse des propositions d’augmentation des salaires, les salariés ont repris le chemin de la lutte. Et l’année 2024 devrait être combative. En 2023, selon l’Insee, le salaire moyen par tête réel, celui qui prend en compte l’inflation, a chuté de 0,3 %. Et cela malgré le versement de la prime de partage de la valeur versée en fin d’année. D’ailleurs, la BCE surveille la modération salariale comme l’huile sur le feu, plutôt que de pénaliser les entreprises qui font gonfler les prix.