La grande évasion proceed. Mille milliards de {dollars} (soit près de 950 milliards d’euros) ont été mis à l’ombre des paradis fiscaux par les entreprises pour la seule année 2022, selon le rapport de l’Observatoire européen de la fiscalité, publié ce lundi 23 octobre.
« Cette grande évasion se passe avant tout en Europe : Microsoft et Apple enregistrent des dizaines de milliards d’euros de bénéfices en Irlande », a expliqué ce lundi matin sur France inter l’économiste Gabriel Zucman, qui a rédigé ce rapport sur l’évasion fiscale mondiale, sur lequel ont travaillé une centaine de chercheurs.
Dans le détail, ces spécialistes estiment que sur les 2 800 milliards de {dollars} de bénéfices réalisés à l’étranger par les entreprises (sur quelque 16 000 milliards de bénéfices mondiaux au complete), 1 000 milliards ont été transférés dans des paradis fiscaux, soit 35 %. Locations favorites de ces transferts dont les multinationales américaines sont les championnes (avec près de la moitié de leurs earnings réalisés à l’étranger concernés) : l’Irlande, les Pays-Bas, les Îles Vierges ou encore les Îles Caïman.
Les milliardaires exemptés d’impôts sur leur fortune
« Les mesures mises en œuvre ces dernières années n’ont pas permis d’endiguer le phénomène », pointe Gabriel Zucman. C’est le cas, par exemple, de l’impôt minimal de 15 % sur les sociétés – décidé sous l’égide de l’OCDE et dont la model finale a été publiée il y a quelques jours – qui ne mettra pas fin au dumping fiscal. D’autant que les niches et autres exonérations privent les États de 130 milliards de recettes supplémentaires.
L’évasion fiscale des riches particuliers, elle, diminue. Elle représente toutefois un quart de la richesse offshore estimée à 12 000 milliards de {dollars} en 2022. Reste également, relève le rapport de l’observatoire, que les milliardaires sont quasiment exemptés d’impôts sur leur patrimoine.
« Les milliardaires paient entre 0 et 0,5 % de leur fortune en impôts chaque année : c’est dû à l’utilisation quasi systématique de sociétés écrans », explique Gabriel Zucman. 2 756 d’entre eux peuplent la planète (75 en France) et totalisent une fortune de 13 000 milliards de {dollars}. Et si une taxe, ne serait-ce qu’à 2 %, leur était appliquée ? « C’est moins de 3 000 contribuables concernés, et ça rapporterait près de 250 milliards de {dollars} chaque année », estime l’économiste.
« Trop longtemps, l’évasion fiscale des multinationales et des individus fortunés a été acceptée comme un effet collatéral inévitable de la mondialisation. Mais elle est le résultat de choix politiques », rappelle Joseph Stiglitz, le prix Nobel d’économie 2021, qui a rédigé l’introduction du rapport.